Début 2011, Michel Libotte décidait de rendre son tablier de façon anticipée. La petite soixantaine, le chef étoilé du “Gastronome” mettait ainsi un terme à une longue histoire familiale remontant à 1875 à Paliseul. Racheté par la société Thomas & Piron, le restaurant a été confié à Clément Petitjean, étoilé à “La grappe d’or” de Torgny. Lequel a dépêché sur place le jeune Français Sébastien Gouguet et à sa femme Mylène, qui ont travaillé pendant trois ans à ses côtés dans son second resto, “L’empreinte du temps”.
Si la déco présente des éléments un peu trop lounge, les lampes, l’espace confortable et la riche vaisselle font de cette maison cossue un lieu moderne à la hauteur du jeune chef. Tandis que dans l’assiette, on se réjouit de retrouver l’esprit de Torgny. Soit une cuisine du produit travaillée qui offre qui plus est un rapport qualité-prix remarquable, récemment récompensé d’un indiscutable Bib gourmand par le Michelin. A côté de son menu 4 serv. à 50 €, on trouve en effet une formule imbattable : une entrée, un plat et un dessert à piocher dans la carte pour 30 €.
S’il est Français, le chef s’est facilement adapté au terroir ardennais, travaillant évidemment le gibier de saison. En entrée, il prépare ainsi le lièvre en rillettes (18 €), servies avec des copeaux de foie gras et un confit d’oignon rouge à la figue.
Très travaillée également, sa volaille d’Ardenne (18 €) est farcie à la duxelles de champignons, le tout servi avec des feuilles de chicon et un très bon fromage local, un bleu de scailton de la bergerie d’Acremont.
Plus classique, le hareng-pommes est bien assaisonné mais présenté dans une crème pommes de terre-hareng trop présente. Alors qu’au contraire, les deux autres entrées manquent un peu de peps dans leur assaisonnement, malgré une très belle exécution technique.
Cuit à basse température, parfaitement tendre, le faisan (28 €) est présenté avec un risotto de grosse semoule trop crémeux (de la fregola sarde?), un carpaccio de cèpes et une sauce au café. Une proposition élégante, agréable, même si l’accord d’ensemble n’est pas parfait.
On préfère les rognons de veau à la Liégeoise au peket (27 €) et leurs pommes noisettes maison, proposés avec un coulis de salsifis et un crumble de champignon des bois. Un plat tout à la fois savoureux et réconfortant!
Deux plats qui s’accompagnent très bien d’un excellent “N°7 Rouge” 2008 du Domaine de la Croix Belle (38 €) de Jacques et Françoise Boyer. Un assemblage de sept cépages qui honorent la richesse des Coteaux du Languedoc.
Mais le vrai coup de coeur, c’est le dessert “Inspiration de nos forêts” (10 €), où explose véritablement, en version sucrée, le parfum des sous-bois et la créativité du chef! Si la glace infusée au chêne offre une belle promesse qui au final est un poil trop fade, l’ensemble n’en reste pas moins remarquable : marron glacé croquant, crumble de noisette, noix et chocolat, coulis de chocolat blanc, biscuit très chocolaté et mousse chocolat au sapin au goût parfaitement affirmé cette fois! Une jolie assiette couronnée d’une feuille de fougère pour rester dans le thème.
A moins que l’on opte pour l’intéressante composition sur le fenouil et le panais (10 €). Le premier est présenté confit (trop sucré) et en chips délicat, le second en petit beignet de panais, avec une glace et un délicieux biscuit au chocolat grand cru.
Tout jeune, Sébastien Gouguet doit sans doute encore un peu ajuster sa cuisine mais on aime sa fougue, ses belles tentatives, sa façon de relire la cuisine ardennaise tout en finesse et modernité. Et ce jusqu’aux mignardises, où d’excellentes pralines rhum-whisky côtoient de très bonnes mini-crème brûlées ou d’originaux mais simplissimes petits mouchoirs de feuilles de brick garnis de mousse au chocolat blanc et framboises.
Cette critique a été publiée dans le « Momento » du 17 novembre 2012.
Envie d’y goûter?
- Cote: 7,5/10.
- Cuisine:
française
.
- Cave: française.
- Cadre: moderne.
- Terrasse: oui.
- Parking: oui.
- Adresse: 2 rue de Bouillon 6850 Paliseul.
- Rens.: 061.53.30.64 ou www.augastronome.be.
- Ouverture: fermé le mardi et le mercredi.
La fille: « L’accueil de Mylène est parfait et rend l’endroit très agréable et moins froid qu’à première vue. Héritage de l’ancienne maison sans doute, la vaisselle de Reichenbach en jette et tant le poivrier en argent que les couverts s’acclimatent à la perfection avec la cuisine très élégante du jeune chef. Lorsqu’il sera plus sûr de ses accords de goûts et surtout de ses assaisonnements, il faudra compter sur lui dans le paysage gastronomique belge! »
Le garçon: « Voilà une adresse au rapport qualité-prix totalement bluffant. Une adresse parfaitement ancrée dans son terroir local qui, après « La Table de Maxime », donne un coup de fouet à la gastronomie ardennaise! Et pour ceux qui trouvent ça un peu loin, ils peuvent toujours loger dans une des belles chambres du lieu (110€) »