En Belgique, on n’a pas des milliers de spécialités culinaires connues dans le monde entier, alors on s’attache à celles qu’on a… A côté de la bière, des gaufres (carrément appelées belgian wafels aux Etats-Unis) ou le chocolat, il y a évidemment la frite, véritable emblème national, presque le ciment d’une nation par ailleurs divisée.
On est tellement fier des frites chez nous qu’on va carrément lui consacrer une Semaine nationale spéciale, du 30 novembre au 6 décembre prochains! Et la Région wallonne organise même un concours pour permettre de gagner un an de frites gratuites! Après, qui osera dire que la Belgique n’est pas le pays du surréalisme?
Le ministre wallon de l’Agriculture Benoît Lutgen (CDH, centre-gauche) souhaite profiter cette 1re Semaine de la frite pour promouvoir les pommes de terre wallonnes. Il a ainsi créé un nouveau, label « Frites de chez nous », qui sera décerné à plus d’une centaine de Friteries wallonnes et dont « l’objectif est de valoriser l’image des friteries traditionnelles et de mettre en lumière le savoir-faire de leurs exploitants ». Espérons que les friteries qui afficheront ce macaron offriront effectivement de bonnes frites, espèces en voie de disparition à Bruxelles par exemple…
Voici un extrait de son communiqué, où l’on découvre un nouveau mot: « frituriste ». Et on ne rit pas, c’est très sérieux… « Il est essentiel de mettre à l’honneur les Frituristes wallons. Les Frites représentent une partie de notre patrimoine culturel et gastronomique belge et wallon. Avec le soutien de l’Unafri (Union nationale des frituristes), le ministre Benoît Lutgen a décidé d’organiser une semaine de la Frite en Wallonie en même temps qu’en Flandre. La semaine de la Frite est donc une action nationale ! Grâce à cette campagne, c’est aussi nos producteurs de pommes de terre que l’on met en valeur. C’est un plus pour l’agriculture et nos agriculteurs. »
Un site a été même créer pour soutenir cette campagne de promomtion de la frite. Sur www.semainedelafrite.be, on trouvera de nombreuses infos sur les frites, les pommes de terre, la campagne de sensibilisation…, mais aussi des bons de réduction spécifiques à chaque Friterie participante. Tandis qu’un concours « Décore ton cornet de Frites » permettra de gagner: un an de frites gratuites ! Bon, c’est peut-être bon pour l’agriculture, mais pour le choléstérol…
La frite en chiffres
Quelques chiffres piochés dans le communiqué du ministre: « Un frituriste moyen vend 100 paquets de frites par jour. Pour ce faire, il a besoin de 50 kg de pommes de terre pelées ou 65 kg de pommes de terre non épluchées. Ensemble, les frituristes wallons traitent au total quelques 130 000 kg de pommes de terre par jour. Pour fournir toute la Wallonie en frites pendant une année entière, il faut environ 1 130 ha de pommes de terre, soit l’équivalent de 2 262 terrains de football. »
La naissance mythique de la frite
Au passage, le ministre wallon n’hésite pas pousser un grand Cocorico en rappelant au passage la légende dorée de l’invention de la frite… « Sur les rives de la Meuse, dans la région de Namur, Andenne et Dinant, l’historien Jo Gérard nota la coutume suivante en 1781 : « Les riverains de la Meuse, surtout les plus pauvres, avaient l’usage de pêcher dans le fleuve des petits poissons (menu fretin) et des les frire pour en faire une sorte de « fritto misto », un délice que vous pouvez encore trouver aujourd’hui en Europe méridionale. Cela leur permettait d’améliorer un peu leurs repas quotidiens frugaux. Lorsqu’il faisait trop froid pour pêcher ou si la rivière était gelée, ils employaient à la place des poissons des pommes de terre coupées en bâtonnets ou même en forme de poisson et les faisaient frire. » L’historien précisa encore que cette coutume était déjà vieille de 100 ans. (…) Les femmes de batelier auraient répandu cette coutume à travers toute la Belgique, le long des rivières et des canaux. »
Et histoire de bien enfoncer le clou, M Lutgen rappelle que, même si on les appelle « French fries » en américain, les frites sont bien belges! « L’explication de ce terme remonte à la Première Guerre Mondiale lorsque les soldats anglais, américains et canadiens étaient cantonnés sur les rives de l’Yser. A l’époque, il y avait dans cette région un nombre important de petites friteries. La langue véhiculaire de l’armée et de la population bourgeoise étant le français, ce qui a naturellement mené à la dénomination « French fries » ou « French fried potatoes ». » CQFD
Attention, la frite n’est pas à prendre à la légère en Belgique. C’est une affaire d’Etat…
Je suis belge et je n’avais pas eu vent de « la semaine de la frite », par contre depuis cette année un musée lui a été consacré à Bruges : http://www.frietmuseum.be/fr/
Je ne l’ai pas encore visité et ne suis donc pas en mesure de vous en parler plus en détails.
Merci Lydia pour cette info.
Si l’on est de passage à Bruges, on ira peut-être y faire une petite visite de ce musée…
est-ce que ce label est quelque chose de décoratif ou est-ce qu’on peut s’y fier ? Je veux dire prend-il en compte la façon dont les frites sont cuites, avec de la graisse, utilisations de pdt pelées, non pelées, de frites pré-découpées ?
parce que cela devient très difficile de trouver de bonnes frites à l’heure actuelle.
Il faudra se rendre dans les friteries « labellisées » pour se faire une idée. Dans son communiqué, le ministre n’évoque pas en effet un quelconque critère de qualité. Il s’agit surtout d’une opération de communication et de promotion.
Mais, bien d’accord avec vous Thierry, cela devient vraiment difficile de trouver des bonnes frites. Surtout à Bruxelles.
Un label, allez encore un. Ou comment noyer les gens dans la confusion. Au lieu de balancer des labels qui ne veulent rien dire, il faudrait informer les gens sur le sens qu’on leur donne et cesser de les prendre pour des cons-sommateurs.
Et pourquoi la « semaine » de la frite ? C’est de cette manière qu’on encourage les gens à varier leur alimentation et éviter une alimentation trop grasse ? Ce n’est pas en contradiction avec les messages de prévention sur l’alimentation: manger 5 fruits et légumes, mentions obligatoires sur les messages publicitaires de type « évitez de manger trop gras » ?
Des abonnements annuels dans les friteries c’est totalement idiot et irresponsable !