Hier soir, « Lyon faisait les 400 coups » à Montréal! Le chef de 29 ans Jonathan Rassi du restaurant « Les 400 coups » – une excellente adresse à ne pas manquer au cœur de la vieille ville – a en effet créé un menu hommage à Lyon dans le cadre du festival « Montréal en Lumière », où la ville des Gones est mise à l’honneur. A découvrir encore ce soir si vous êtes à Montréal…

 

Libre inspiration

 

Lors de deux soirées spéciales Lyon, ces mercredi 1er et jeudi 2 mars, le jeune Montréalais présente un menu 5 services (75$ + 45$ avec la sélection de vins) très librement inspiré de la cuisine lyonnaise et plus largement française, avec des variations sur la tarte à l’oignon, la fricassée de poularde et le poisson en écailles à la Bocuse ou encore la tarte Tatin.

Les 400 coups, restaurant Montréal, Montréal en Lumière, Jonathan Rassi

Mais à vrai dire, c’était surtout pour voir de quel bois se chauffe Jonathan Rassi, dont on avait eu de bons échos, qu’on a eu envie de participer à cette rencontre inattendue entre les cuisines québécoises et lyonnaises. Passé par de belles maisons comme « L’Oustau de Baumanière »** aux Baux-de-Provence et surtout par « The restaurant at Meadowood*** » à Napa, qui a marqué à jamais le jeune chef par la philosophie ultra-locavore du chef triplement étoilé Christopher Kostow. Là-bas, en Californie, tous les chefs bossent cinq jours en cuisines et un au jardin! Lequel permet de subvenir à tous les besoins du restaurant en termes de fruits et légumes.

Les 400 coups, restaurant Montréal, Montréal en Lumière, Jonathan Rassi
Toast de sarrasin, palourde fumée et labneh, servi sur du sapin avec du concombre en pickles et de la prune salée façon umeboshi maison. La preuve qu’ici, on mise sur la conserve! Une belle mise en bouche… pas très lyonnaise.

 

Cuisine 100% locavore

 

A la tête des « 400 coups » depuis un peu plus d’un an, Jonathan Rassi a adopté cette philosophie et même s’il n’a pas de jardin, il sélectionne un à un les petits producteurs avec lesquels il souhaite travailler pour mettre en avant le terroir québécois. Il travaille ainsi le sanglier sauvage – une rareté au Québec, car les restaurants n’ont normalement pas l’autorisation de servir du gibier -, des plantes sauvages de Gaspésie, des fromages locaux comme le « Bleu d’Elizabeth » de la fromagerie du Presbytère… Et il va même plus loin, puisqu’à part le chocolat et le vin, il n’utilise aucun produit importé. Dans ses assiettes, pas de citron ni d’huile d’olive donc! Et pour contrer le rude hiver québécois, toute sa brigade s’affaire le moment venu pour remplir le cellier avec des fruits ou des légumes au meilleur de le goût et qui seront préservés de mille et une manière.

Les 400 coups, restaurant Montréal, Montréal en Lumière, Jonathan Rassi

Dans l’assiette ça donne quoi? Une tarte « Lyonnaise », soit une pâte feuilletée maison pleine de peps avec des oignons et des poireaux travaillés brûlés, confits, en lacto-fermentation… associés à une soubise, à la tomme de la Grosse Île tournée comme une tête des moines, le tout relevé par une pointe de sriracha maison.

 

Hommage très personnel à Bocuse

 

La dorade du Nouveau Brunswick en écaille de pommes de terre qui suit est sans doute le plus bel hommage à Lyon et à Bocuse, mais elle est travaillée avec toute la modernité d’un jeune chef qui ose la servir avec une sorte de dashi réalisé avec du kombu de Gaspésie. Quel plaisir de goûter à ce poisson juste passé au sel et mi-cuit dont l’extrême fraîcheur n’avait besoin de nul autres fioritures.

Les 400 coups, restaurant Montréal, Montréal en Lumière, Jonathan Rassi

Avec la fricassée de lapin de la ferme Besnier près de Québec, on est dans un plat plus gourmand encore, servi avec des racines de saison tournées (carotte, navet…), des champignons maitakés (pour remplacer les morilles) et une sauce à l’estragon. Dommage ce léger excès de sel mais la sauce est classiquement divine avec la profondeur amenée par la douce moutarde sauvage du Québec. Une très belle réinterprétation de la fricassée de volaille de Bresse de Paul Bocuse!

Les 400 coups, restaurant Montréal, Montréal en Lumière, Jonathan Rassi

 

Une glace à la pomme noire!

 

Pour finir, si la tarte tartin est un peu brouillonne, décomposée et allégée, on est bluffé par cette glace à la pomme noire aux notes caramélisées. Ses pommes noires, Jonathan Rassi les a imaginées en leur appliquant la même technique que l’ail noir asiatique. Le résultat est tout simplement incroyable!

Les 400 coups, restaurant Montréal, Montréal en Lumière, Jonathan Rassi

Le chef avoue qu’avec cette contrainte de revisiter la cuisine lyonnaise, il a livré des assiettes sans doute un peu plus classiques que celles de sa carte habituelle. Mais c’est loin de nous déplaire! Contrairement à beaucoup d’adresses de la jeune cuisine montréalaise, qui font souvent dans la cuisine rock »roll (ça passe ou ça casse…), tout était ici parfaitement cadré sans être ennuyeux. Un bonheur! On a aimé la cuisine à la fois maîtrisée et créative de Jonathan Rossi et surtout sa manière de penser et de travailler. A 29 ans, il a déjà tout compris de ce qui fera la nouvelle grande cuisine québécoise de demain.