La cuisine est-elle politique, de gauche ou de droite  ? Cette question piquante traverse “Chefs des chefs”, ouvrage signé Gilles Bragard (aidé par le journaliste de “M” et d’Arte Christian Roudaut). 

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La dernière assemblée des Chefs des chefs s’est tenue à Washington du 26/7 au 3/8.
En présence notamment du président Obama…

La cuisine est-elle politique, de gauche ou de droite  ? Cette question piquante traverse “Chefs des chefs”, ouvrage signé Gilles Bragard (aidé par le journaliste de “M” et d’Arte Christian Roudaut). En 1977, Bragard fondait à Collonges, chez Paul Bocuse, le “Club des Chefs des Chefs”, association très exclusive réunissant quelques cuisiniers de chefs d’Etat  : France, Belgique, Etats-Unis…

Aujourd’hui, l’association compte 21 membres (la Belgique n’en fait plus partie), qui se réunissent une fois par an, durant les vacances diplomatiques, pour parler de leur métier mais aussi s’échanger quelques tuyaux en vue de la préparation du prochain sommet ou dîner officiel. A côté du fameux téléphone rouge, existe en effet un téléphone bleu qui relie les cuisines de l’Elysée et de la Maison Blanche en passant par Buckingham Palace. Pour éviter tout impair “gastrodiplomatique”, il s’agit en effet de se renseigner sur les “likes” et “dislikes” du chef d’Etat invité. On apprend ainsi ici que Nicolas Sarkozy, qui déteste le fromage, exigeait néanmoins qu’il soit systématiquement servi à Angela Merkel, qui en raffole… Jusqu’au syndrome bien connu de la tête de veau de Chirac, son plat préféré, qu’on lui servait à toutes les sauces jusqu’à l’indigestion…

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“Chefs des chefs” ne démontre pas que la cuisine est politique – la preuve, bien souvent, alors que le chef d’Etat part, le chef reste. Mais, comme l’explique un ancien ambassadeur britannique  : “En diplomatie, la gastronomie peut être un bon lubrifiant.” “C’est à table que l’on gouverne”, disait déjà Bossuet. Phrase qu’aurait pu reprendre à son compte Talleyrand, véritable “diplogastronome” au début du XIXe siècle. Sous-titré “Enquête dans les cuisines du pouvoir”, cet ouvrage n’est pas totalement original; la question a en effet déjà été abordée dans des documentaires ou dans “White House Chef”, publié en 2007.

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Reste que, bourré d’anecdotes amusantes, “Chefs des chefs” se dévore avec curiosité. A l’occasion de la dernière réunion du “Club des Chefs des chefs”, Gilles Bragard a en effet interrogé tous ses membres, ainsi que des anciens, et compile ici leurs souvenirs. Où il est question de la paranoïa de l’entourage des présidents américain et surtout russe – par crainte d’empoisonnement, on goûte chaque plat de Vladimir Poutine… –, de la gastronomie comme étendard de la culture nationale (mise en avant des produits locaux…) ou encore de l’instrumentalisation politique de la cuisine. Comme lorsque la chef californienne Alice Waters mène la fronde contre le Français Pierre Chambrin lors de l’arrivée au pouvoir du couple Clinton, qu’elle parvient à faire remplacer dans les cuisines de la Maison blanche par un chef américain. Ou quand Michelle Obama utilise le potager bio qu’elle a créé dans les jardins de la Maison blanche comme un instrument de communication, relayé par le blog Obamafoodorama…

Envie de lecture?

  • “Chefs des chefs”, publié par Gilles Bragard et Christian Roudaut aux Editions du moment (200 pp., env. 18 €).