A Battice, l’éleveur José Munnix produit un excellent fromage de Herve au lait cru. Et se présente comme l’un des derniers irréductibles face au quasi monopole du Herve Société.
Il fait gris et pluvieux en ce samedi d’été. A travers les gouttes, on devine néanmoins la majestuosité du paysage. Vert, très vallonné, le Pays de Herve conserve son bocage traditionnel. Champs et prés sont en effet toujours enclos de haies ou de rangées d’arbres. Même si les primes à l’abattage ont eu raison d’une partie des arbres fruitiers, qui faisaient partie intégrante de l’écosystème local. En témoigne encore le fameux sirop de pommes et de poires artisanal plus connu sous le nom de sirop de Liège…
Au fond d’une cuvette entourée de prairies, se détache une simple ferme en briques rouges. C’est là que José Munnix élève depuis 43 ans une quarantaine de vaches pie noir holstein, qu’il insémine lui-même avec du sperme de taureaux nord-américains sélectionnés pour leurs qualités génétiques. Car il a beau être le dernier producteur de Herve au lait cru fermier, le bonhomme n’en est pas rétrograde pour autant ! Du temps de son père, la pie noir était plus petite et moins productive. Grâce à la sélection génétique, on a doublé les quantités de lait. “C’est un sacré progrès ! Il est important également que le lait ait un taux élevé en matières grasses. Là aussi, la génétique entre en jeux. Mais on doit surtout donner une nourriture équilibrée aux vaches.”
C’est en 1970 que José Munnix a repris la ferme de son père, qui avait lui-même succédé au grand-père en 1945. L’éleveur est propriétaire des bâtiments mais locataire des 26 ha de prairies où paissent ses vaches. S’il vend son lait à une laiterie, il en garde une partie pour fabriquer artisanalement du fromage de Herve, en fonction de la demande, qu’il écoule en vente directe à la ferme et à quelques fromagers du coin (cf. ci-dessous).
José Munnix aime dire qu’il est né dans le fromage. Enfant, quand il rentrait de l’école, il aidait ses parents à la ferme et a tout naturellement repris la production de Herve quand sa mère Alice a arrêté. “Le fromage rapporte plus que le lait. Quand je lance une production, je fabrique 500 fromages en moyenne, mars étant le mois le plus important”, précise José Munnix. Et de s’enflammer lorsqu’il décrit la fabrication artisanale de son précieux fromage.
“Lorsqu’on trait, le lait sort à 38-39°C du pis de la vache. Lorsque débute le travail du fromage, il a déjà un peu refroidi. En hiver, on doit d’ailleurs le réchauffer par un système de bain-marie pour activer la fermentation.” En effet, quand le lait arrive à l’atelier de production dans une cuve-mélangeur en inox, il est à 32°C. Il n’est pas nécessaire d’y ajouter des ferments car ils sont naturellement présents dans le lait cru, au contraire du lait pasteurisé. Par contre, pour faire cailler le lait, José Munnix y ajoute de la présure animale (de la caillette de veau), achetée à un laboratoire français. Le lait repose ensuite environ 1 h 30.
Quand le lait a caillé, il est découpé en gros grains à l’aide un “tranche-caillé”. Enfin, à l’aide d’une grande passoire en inox, on récupère le caillé, qui s’est séparé du lactosérum. Quand le caillé a la bonne consistance, on le glisse dans des moules, contenant chacun 4 fromages.
“Pour un fromage de 200 g, il faut 1,9 l de lait”, précise José Munnix, qui a créé une ingénieuse machine qui égoutte les fromages en les retournant automatiquement tous les quarts d’heure pendant 2 à 3 jours. “Ils ont alors un PH de 4-7. Mais pas besoin de tests… On sent à l’odeur et au toucher quand ils sont prêts.” Déposés sur une grande table en inox, les fromages sont alors salés à sec, en les frottant sur les quatre faces. Le doux est salé une seule fois, le piquant deux fois. Officiellement (dans le cahier des charges de l’appellation) 3 % de sel pour le premier, 6 % pour le second. A ce stade, les Herve frais ont une semaine et sont toujours blancs, avec un goût proche de celui de la feta.
Les fromages sont ensuite descendus dans la cave d’affinage, où ils seront lavés à la main trois fois par semaine à l’eau claire. Dans cette cave humide aux murs rechaulés chaque année et où règne une température de 13 à 14°C, la bactérie linens ou ferment du rouge, typique du Pays de Herve, peut se développer. C’est elle qui donnera sa couleur jaune-orangée au Herve mais aussi sa typicité gustative. “C’est la bactérie du terroir !, lance José Munnix. Des membres de ma famille se sont installés à La Roche. Là-bas, ils n’arrivaient pas à fabriquer leur fromage, la bactérie n’était pas là…”
Les Herve sont alors affinés six à huit semaines pour les doux et trois à quatre mois pour les piquants. “Un vrai Herve s’affine de l’extérieur vers le cœur, car il s’agit d’un fromage à pâte molle. Tandis que pour un fromage dur ou demi-dur, tout s’affine en même temps”, explique José Munnix.
Et si on demande à M. Munnix si le Herve était meilleur avant, il répond qu‘il s’agit d’un fromage vivant, très différent selon les saisons et le climat. “Par temps orageux, les fromages sont moins bons; ils ont tendance à gonfler. Ils sont aussi moins bons lorsque les prairies sont trop sèches. Le lait cru a même une saveur différente d’une ferme à l’autre. C’est ce qui est important dans le Herve et qu’on n’a pas avec l’industrie, qui propose des fromages homogènes.”
Si José Munnix a été obligé de s’adapter aux nouvelles normes de production, il ne les approuve pas pour autant. “Aujourd’hui, tout est obligatoirement en inox; on ne peut plus utiliser le bois. Pourtant, l’inox est moins hygiénique ! On sait aujourd’hui que certaines bactéries, comme le staphylocoque doré, se développent très bien sur l’inox…” Mais le fermier n’est pas pour autant nostalgique de la tradition, assurant qu’avec l’expérience, il est arrivé à un résultat plus ou moins identique à celui obtenu avec le bois. “Je fais du meilleur Herve aujourd’hui qu’il y a quelques années !”, estime-t-il même…
José Munnix a donc des idées bien arrêtées sur son métier. Pas Ecolo pour un sou, il préfère parler d’agriculture raisonnée plutôt que de bio, “une affaire de gros sous !” Il est pourtant l’un des témoins du superbe documentaire de Jean-Jacques Andrien “Il a plu sur le grand paysage” (rediffusé ce samedi soir à 1 h 05 sur La trois), qui mettait en lumière la profonde détresse des producteurs de lait en Pays de Herve lors de la crise du lait de 2009.
Et José Munnix d’expliquer : “Aujourd’hui, les normes qu’on nous impose sont trop lourdes. La “check list” pour obtenir le certificat QFL (Qualité Filière Lait) est très pénible, sans parler des contrôles de l’Afsca. Les investissements à réaliser sont intenables. Ils veulent qu’on leur communique à quelle heure a été effectuée la traite, si il y a eu des pauses durant celle-ci… Autant installer des caméras de surveillance !” Et de continuer : “Aujourd’hui, tout est fait pour éliminer les petits producteurs. On ionise les fromages, on les stérilise à froid pour détruire les bactéries et permettre une conservation plus longue mais c’est alors un fromage mort, qui n’évolue plus. Mais cela permet aux industriels d’avoir de très bonnes analyses bactériologiques. C’est comme ça qu’on privilégie les produits industriels par rapport aux produits naturels…”
José Munnix insiste encore sur l’importance du lait cru dans l’alimentation humaine, précisant que les fromages élaborés à base de lait cru assurent leur propre défense contre la prolifération de la listeria monocytogenes et qu’au contraire, la chute de la biodiversité microbienne des laits microfiltrés ou des laits pasteurisés favorise la croissance de la listeria, qui prolifère en cours d’affinage.
“Je suis un anarchiste !”, conclut, bougon, José Munnix, qui n’a même plus droit à l’appellation “Fromage de Herve”, pas tout à fait en règle avec l’AOP. Pourtant, lorsqu’on goûte son Herve doux, et peut-être plus encore son Herve piquant, parfaitement coulant, c’est tout un univers qui se dévoile, celui du vrai fromage de Herve, l’unique, élaboré à base de lait cru. Et l’on comprend que ce dernier producteur fermier se révolte contre le système. Gageons qu’il y aura encore des gens prêts à se battre pour faire exister un produit artisanal qui, ses enfants ayant décidé de ne pas reprendre la ferme, risque de disparaître avec José Munnix…
Vente directe
A la ferme de José Munnix, on achètera ses Herve longs (Hervlon) doux et piquants (2 €) mais aussi son lait cru (0,50 €/l) et sa délicieuse maquée au lait cru (1€/250g). Des produits exceptionnels presque donnés au vu de leur qualité… Les fromage de M. Munnix sont également vendus à la fromagerie « Uguzon », en Neuvisse à Liège, chez Jacques Balancier à la « Cave du fromager » à Aywaille ou encore à l’Abbaye du Val-Dieu voisine.
- 122 rue de Maestricht 4651 Battice.
Tél. : 087.67.40.01.
Un autre Herve au lait cru
Le Herve de la Ferme du Vieux Moulin, bien connu des gourmets, n’est pas un Herve au lait cru fermier mais il est produit avec le lait cru d’une ferme voisine et propose même un Herve bio. Il est très bon également et on le trouve plus facilement. A Bruxelles chez l’affineur Julien Hazard par exemple mais aussi chez « D’ici » à Naninne.
- 14 rue sur la Commune 4651 Battice.
Tél.: 087.67.42.86.
Deux recettes au Herve au lait cru
Un très bon reportage qui nous apprend tout sur l’élaboration d’un fromage de Herve. J’ai bien aimé cette notion d’un fromage vivant…Le témoignage de M. Munnix laisse un peu d’espoir face à l’évolution de l’agriculture herbagère en pays de Herve. Faut-il être anarchiste pour survivre?
Merci de votre acceuil, vraiment de bons produits fermiers surtout l’herve
Très bel article.
Une toute petite correction serait la bienvenue:
Ce n’est plus Jacques Balancier à la cave du fromager à Aywaille mais Maud et Denis Wilkin, un jeune couple qui a repris il y a une petite année.
Bonjour
J’ai lu que les produits de Mr Munnix étaient mis à rude épreuve récemment
Je suis spécialiste des problèmes de contamination Listeria et ai travaillé pour des fromageries produisant des fromages au lait cru en France.
Peut être pourrais-je l’aider ?
Pourriez vous me mettre en contact mail avec ce Monsieur?
Bien cordialement
JY Bignon
http://fr.linkedin.com/in/jeanyvesbignon
Voilà plus de vingt ans que je degustes ce merveilleux fromage et que je le fais connaitre a tout mes amis en europe et même plus loin dans le monde voyageant souvent pour le boulot on me réclame le fromage et la maquee et les merveilleux et savoureux poulet de monsieur munninx alors monsieur et madame de lafsca aller deguster de vrais produit dans cette ferme etje penses que vous reveerrez votre jugement et vos normes afin que continue des traditions centenaires devras produits de terroir comme les gens plus ages l’on connu et on envie de continuera les savourer et non pas devoir manger des mets mort et industriels enfin si vous avez besoin d’une voix pour defendre ces saveur je vous laisses mes coordonnées Dehousse Pascal rue charlier 8 heure le romain 4682
Voilà plus de vingt ans que je degustes ce merveilleux fromage et que je le fais connaitre a tout mes amis en europe et même plus loin dans le monde voyageant souvent pour le boulot on me réclame le fromage et la maquee et les merveilleux et savoureux poulet de monsieur munninx alors monsieur et madame de lafsca aller deguster de vrais produit dans cette ferme etje penses que vous reveerrez votre jugement et vos normes afin que continue des traditions centenaires devras produits de terroir comme les gens plus ages l’on connu et on envie de continuera les savourer et non pas devoir manger des mets mort et industriels enfin si vous avez besoin d’une voix pour defendre ces saveur je vous laisses mes coordonnées Dehousse Pascal rue charlier 8 heure le romain 4682