L’un est l’un des plus grands noms du jazz actuel, l’autre l’un des meilleurs chefs américains. Qu’est-ce qui a poussé le trompettiste Wynton Marsalis et le chef deux étoiles David Kinch à se retrouver sur la scène de “Paris des chefs” ? “C’est chouette d’être avec un ami et de faire quelque chose avec lui. C’est agréable aussi d’être en France, à Paris, de profiter aussi de cela.” Leur amitié remonte en effet à l’enfance. Tous deux sont originaires de La Nouvelle Orléans et se souviennent de leur détermination respective à réussir dans leur passion…

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Et si leurs parcours les ont éloignés – le chef est basé au “Manresa” à Los Gatos, au sud de San Francisco, tandis que Marsalis parcourt la planète –, ils sont toujours restés en contact. Uni par cette idéntité du sud des Etats-Unis qui ne les a jamais quittés. “Il en reste quelque chose dans ma cuisine. Mais il ne s’agit pas d’un ingrédient ou d’un style; c’est plus profond. Quand vous cuisinez, c’est toujours le résultat d’où vous avez été et de ce que vous avez fait. C’est dans ma personnalité.” Et Marsalis d’enchaîner : “Il est humble et a toujours été très intègre. Ça se sent dans son restaurant, dans ses plats, dans sa façon de cuisiner. Son but est de rendre les gens heureux, de faire quelque chose de bien. C’est important de raconter cette histoire, cette intégrité. C’est en cela qu’il représente ce qu’il y a de mieux à la Nouvelle-Orléans. Il prend toutes les cuisines et, au lieu d’imiter, transforme les concepts pour créer une nouvelle forme de cuisine. Et c’est ce que j’essaye aussi en quelque sorte de faire dans ma musique.”

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Sur scène, Marsalis improvisait sur des morceaux que lui ont inspirés les plats que cuisinait, en rythme, Kinch. Ainsi, le très impressionniste “Mood Indigo” de Duke Ellington collait à merveille à la cuisine saisonnière et spontanée du chef. “J’étais toujours en train de le regarder. J’essayais de voir ce qu’il faisait”, explique Marsalis. Pour le jazzman, l’interaction avec Kinch est naturelle. “Elle est évidente car on a vraiment une relation personnelle. On se connaît depuis 35 ans, on a été en classe ensemble. On s’est toujours apprécié. On a toujours gardé contact depuis qu’on a 15 ans. Il y a toujours eu un respect mutuel, on s’apprécie énormément, je le soutiens depuis toujours.” D’ailleurs, au-delà de cette performance parisienne, les deux ont des envies de projets communs. “On a une idée de livre. On en parle depuis plusieurs années. Il y a tellement de similarités dans notre approche de la création”, explique Marsalis. Une idée proche de celle du chef Pierre Gagnaire et du musicien Chilly Gonzalez sur le livre-CD “Bande originale”.

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Selon Marsalis et Kinch, venir à Paris était aussi une façon de donner une autre image de la cuisine américaine. “J’ai été dans beaucoup de restaurants aux Etats-Unis et il n’y a pas beaucoup de chefs comme lui. Il propose des combinaisons de goûts extraordinaires. Il a développé des techniques, utilise différents styles de cuisines, différents pays l’ont influencé”, s’enflamme Marsalis. “Beaucoup d’Européens sont ignorants, ils limitent la cuisine américaine aux simples hamburgers, se désole Kinch. Aux Etats-Unis il y a un régionalisme fort et très complexe, comme partout ailleurs. La cuisine en Nouvelle-Angleterre est très différente de celle de Géorgie, de Charleston ou du Texas. Mais il ne faut pas confondre cuisines et chefs. Chaque chef est le produit de son expérience personnelle. Mon restaurant a presque 10 ans, il est situé dans le nord de la Californie. Nous voulons qu’il soit l’expression de qui nous sommes mais aussi d’où nous sommes, comme d’autres grands restaurants ambitieux.”

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Et pour exprimer au mieux le “terroir californien”, Kinch s’est associé, comme la plupart des grands chefs actuels, avec une ferme près de Santa Cruz, dans le sud de la Californie, qui lui fournit tous ses légumes organiques. Une démarche écologique mais pas seulement. “C’est surtout une question de qualité des produits. Je choisis en collaboration avec mon jardinier les variétés que nous allons cultiver. Nous avons plus de 200 variétés actuellement.”

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