Le boeuf wagyu japonais va enfin être exporté en Europe. Dégustation et découverte de ce produit d’exception… 

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Une viande joliment marbrée

Il est beau, ses marbrures explosent en milliers de fleurs, il est brillant, extrêmement fondant et long en bouche… On vient de le découvrir, il s’agit du boeuf de Kobe! Ce mardi, lors d’un déjeuner au « Wy » étoilé de Bart De Pooter au Sablon à Bruxelles, on pouvait admirer cette viande noble sous toutes ses coutures et la déguster. Devant un parterre de de journalistes surexcités, le chef doublement étoilé du « De Pastorale » proposait une série de dégustations savoureuses pour vanter les mérites de ce produit d’exception.

Commençant par des tranches fines, comme on consomme traditionnellement le boeuf wagyu au Japon puis en évoluant vers des morceaux plus épais et moins gras. Bart De Pooter a ainsi décliné le boeuf de Kobe en un excellent shabu-shabu (bouillon) aux enokis et asperges vertes pour profiter de son beau persillé cru, un mini hamburger pour se régaler d’une viande juteuse à souhait, une carbonnade à la flamande pour surprendre et tester son fondant et quelques divins morceaux d’entrecôte pour ancrer à jamais ce goût de viande subtil dans notre mémoire gustative.

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Quelques morceaux d’entrecôte de boeuf de Kobe servis avec du kimchi selon
Bart de Pooter 
© Wim Kempenaers 

Ce fameux boeuf wagyu a marqué à jamais la mémoire du chef flamand lors d’un voyage à Osaka il y a quelques années. C’est pour cette raison, que sitôt l’autorisation reçue par le Japon d’exporter sa précieuse viande en Europe, en juin 2014, il a décidé d’importer le boeuf de Kobe en Belgique. Et l’action de lobbying du commerce extérieur japonais est déjà bien avancée puisque cette viande de choix sera distribuée en Belgique chez quelques bouchers de renom et dans les magasins Colruyt fin octobre.

Un prix exorbitant

Mais difficile de savoir si cette viande saura séduire les consommateurs belges car son prix exorbitant a de quoi couper l’appétit: entre 150 et 300€ le kilo, suivant le morceau! Elle est aussi bien plus grasse que le traditionnel blanc-bleu belge… Pourtant, les foodies devraient être séduits par son goût réellement exceptionnel et la recherche d’excellence dans sa méthode de production.

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Hisato Hamada et le chef Bart De Pooter © Wim Kempenaers 

Hisato Hamada, « Master of Wagyu » – titre que l’on obtient après 20h de cours théorique et 10h de pratique – avait fait le déplacement depuis le Japon. Depuis 5 ans dans le métier, il insistait à Bruxelles sur le fait qu’au Japon, les acheteurs peuvent tout savoir de l’animal qui est dans leur assiette par un système de tracking accessible sur leur téléphone portable, et qui les informe notamment sur l’arbre généalogique de l’animal. Une généalogie très importante pour les Japonais puisqu’elle leur permet de garantir que leur boeuf de Kobe est issu à 100% de la lignée Tajima-Gyu, une vache noire japonaise élevée uniquement dans la préfecture de Hyogo et qui à l’origine était un animal de trait puissant.

Pour Hisato Hamada, la qualité d’un boeuf, c’est 60% d’ADN et 40% d’élevage. Selon lui, le boeuf wagyu élevé à l’étranger ne peut pas garantir une même pureté de la race. Les wagyu australien ou américain — plus accessibles et qui inondent le marché alors que la production japonaise est très restreinte — sont toujours des hybrides, croisés avec de l’Angus.

 

Un « vieillissement vivant »

Une autre différence majeure, selon le « Master of Wagyu », tient au fait que les Japonais ne laissent pas leurs bêtes dans les pâturages après 10 mois, les animaux bougent moins et leur viande est bien grasse – en japonais on compte pas moins de 10 mots pour définir le degré de persillage de la viande – avant leur abattage au bout de 40 mois. Quand on sait qu’en moyenne, en Europe, on tue un boeuf après environ 20 mois, on comprend pourquoi Hisato Hamada aime parler de « vieillissement vivant de la viande » en référence à la mode actuelle de la maturation!

Le système d’évaluation des carcasses de bœuf wagyu est lui aussi unique. Il est effectué par la Japan Meat Grading Association, seule association agréée par les autorités japonaises. La qualité de la viande est estimée suivant quatre critères: le degré de persillage, la couleur et la brillance de la viande, la fermeté et la texture du tissu musculaire et enfin la couleur et la brillance de la graisse. Le rendement en viande des carcasses est également évalué.

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Les Japonais bichonnent leurs boeufs de Kobe. Dans un environnement sans stress
et avec une nourriture de qualité ils développent leur chair exceptionnelle!

Aujourd’hui, le nombre d’éleveurs de wagyu a énormément diminué au Japon. En cause, l’âge des éleveurs, en moyenne 70 ans, mais également les investissements importants demandés, 100 bêtes coûtent 1 million de dollars! Peut-être cette ouverture aux marchés européens permettra-t-elle de donner une seconde vie à cet élevage, un trésor national trop longtemps protégé.

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Le persillage abondant est une des caractéristiques majeures
du boeuf wagyu japonais © Wim Kempenaers 

 

Idées reçues sur le wagyu

Contrairement aux idées reçues, le boeuf wagyu japonais n’est pas abreuvé de saké, ni même massé avec cet alcool de riz. Tout au plus on lui donne de la bière, ou le plus souvent du malt et de l’orge. Mais il est effectivement élevé et nourri avec soin, avec de la paille de riz, des algues marines moulues et du charbon de bambou pour faciliter sa digestion, mais aussi, dans les derniers mois de sa vie, du maïs pour obtenir une graisse bien blanche.

Autre idée reçue, boeuf wagyu — de « wa » (Japon) et « gyu » (bœuf) — ne signifie pas forcément boeuf de Kobe. En effet, le wagyu est élevé depuis les années 50 dans différentes villes et préfectures du Japon, comme Ohmi, Yonezawa, Maesawa et Matsusaka. Kobe est toutefois la ville la plus réputée pour la qualité de sa viande mais chaque zone de production possède son terroir spécifique et une consommation liée à la culture locale.

 

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Les carbonnades à la flamande au bœuf de Kobe à la bière 
Artus 
de Bart De Pooter © Wim Kempenaers

A Kobe, port qui s’est ouvert au commerce international en 1868, on n’avait pas l’habitude de consommer de la viande. Ce sont les Anglais et les Allemands qui y ont introduit le steak, devenu aujourd’hui une des spécialités des lieux. Tandis qu’à Matsusaka, où on produit traditionnellement de la sauce soja, on consomme le boeuf plus volontiers en sukiyaki, un bouillon à base de sauce soja dans lequel le boeuf est cuit avec des légumes et des nouilles.