N’en déplaise aux puristes, la RTBF a cette fois cédé aux sirènes de la télé contemporaine. Après “The Voice” le mardi, place le jeudi, pour 7 semaines, à Comme un chef. Si l’on reste dans une télévision formatée, l’émission culinaire de la RTBF se la joue quand même téléréalité soft. Il ne s’agit pas de mettre en scène une compétition forcenée entre ses jeunes candidats mais plutôt de mettre l’accent sur une forme de transmission du savoir gastronomique. A découvrir ce soir à 20h20 sur la une.

Comme un chef, Candice Kother, Emission RTBF, comme un chef saison 2

Une thématique qui a forcément dû parler à Candice Kother. La coach des jeunes apprentis cuisiniers est en effet la fille de Jacques Kother, journaliste à la RTBF et fondateur en 1967 du “Guide des connaisseurs”, décédé fin 2009. “J’ai vécu dans une famille où la gastronomie était un bonheur et un partage quotidiens; mes parents cuisinaient tous les jours. J’ai grandi avec deux cultures culinaires très marquées car ils étaient d’une génération différente. La cuisine de mon père était roborative : une cuisine traditionnelle, à la graisse d’oie. Ma mère pratique une cuisine plus moderne, une cuisine pratique de femme active. Mais l’éducation du palais a toujours été une de leurs préoccupations. C’est essentiel. Et il y a un vrai parallèle avec “Comme un chef”, qui met en avant les mêmes choses : une tradition et des valeurs à transmettre. On a pensé, il y a quelques années, qu’on allait vers un retour aux sources, que les gens se remettaient à cuisiner. Mais on retourne vers la malbouffe. Il est important de transmettre le savoir-faire et le savoir-vivre que constitue la cuisine.”

Pourtant, hormis ses gênes, rien ne prédisposait Candice Kother à se placer dans les pas de son père. “C’est une passion qui est devenue un métier. J’ai une formation en sciences po’ à l’ULB et j’ai fait une spécialisation en coopération au développement. J’ai passé du temps en Inde avant de rentrer à Bruxelles, où j’ai travaillé à l’ambassade indienne. Mais après un an, j’ai cru que j’allais faire une dépression nerveuse, que si je continuais, ma vie serait horrible…”

La jeune femme s’est d’abord tournée vers le journalisme. Mais sa rédac’ chef n’a rien à lui proposer en politique… La cuisine, c’est donc un “hasard complet”. “Au début, j’ai cru que ce serait temporaire, que j’allais retourner vers la politique. Mais cela a pris tout de suite.” Après la presse écrite, la radio s’est rapidement intéressée à elle – son émission “En cuisine”, le samedi matin sur Vivacité, connaît un réel succès –, tandis que le passage à la télé s’est fait naturellement. “Aujourd’hui, la cuisine, c’est ma voie, clairement !”

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Passionnée, Candice Kother observe en connaisseuse le développement des émissions culinaires. “Je suis complètement addict. J’ai commencé les à suivre avant même qu’elles ne débarquent chez nous. J’ai regardé “Master Chef” dans sa version australienne. Je suis accro à “Un dîner presque parfait”; j’adore voir les gens cuisiner. La cuisine est devenue le nouveau hobby à la mode. Depuis quelques années, avec les contrôles d’alcoolémie ou l’interdiction du tabac, aller au resto est devenu moins agréable. Les gens se sont tournés vers leurs chaumières, avec une envie de bien faire, de faire comme au restaurant. On a redécouvert le plaisir de recevoir ses amis. Ça a commencé avec les cours de cuisine et cela a fait boule-de-neige à la télé.”

Ceci dit, on peut se demander si le public de “Top Chef”, “MasterChef” ou “Comme un chef” est réellement passionné de cuisine ou s’il y retrouve les mêmes ressorts que dans toutes les émissions de téléréalité. “La téléréalité nous montre des gens qui s’en sortent, tandis que la compétition, ça fonctionne toujours. Mais ici, on a en plus le plaisir d’apprendre des petites choses. Car si tout le monde ne chante pas, tout le monde mange ! C’est sans doute pourquoi ses émissions prennent le pas sur les autres.”

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Pour la jeune femme, “Comme un chef” n’est ceci dit pas non plus une téléréalité comme les autres. “Ce qui fait sa spécificité, c’est son humanité, sa bienveillance, sa générosité. Tout comme l’accent mis sur la transmission et son ancrage belge. Ce sont de belles valeurs qui parlent à tout le monde.” On est loin en effet ici de la trash TV. “Comme un chef” surfe plutôt sur la vague de la Feel Good TV. “On est dans une télé qui fait du bien. On sort de cette émission avec un sentiment positif. On les accompagne, on entre dans leur quotidien. On peut s’identifier davantage. Dans “MasterChef” ou “Top Chef”, il y a plus de dramatisation. On regarde les malheurs des candidats avec intérêt mais un peu en voyeur, avec plus de distance. Ce n’est pas le cas pour “Comme un chef”. Le Belge est bon enfant…”

Paradoxalement, si la téléréalité culinaire a la cotte en Belgique comme ailleurs, il y a peu d’émissions de cuisine sur notre petit écran francophone. “Ce sont des vagues, c’est cyclique, estime Candice Kother. C’est pour que les gens ne se lassent pas. Mais cela doit bouger, ça reviendra. La cuisine est très dynamique en ce moment, en télé comme en radio.”