On sait que l’immense Alain Passard est réputé pour sa cuisine des légumes…

Mais saviez-vous que le chef trois étoiles de “L’arpège” a imaginé, début novembre, un repas autour du gibier pour Aberlour  ?

Dans les cuisines privées de Passard

Il fait froid et déjà noir quand on débarque dans le hameau du Bois-Giroult, à une trentaine de kilomètres de Dreux. En pénétrant dans une belle bâtisse centenaire, on est accueilli par la chaleur apaisante d’un feu de cheminée. Et par la poignée de main ferme d’Alain Passard, qui invite dans son domaine privé de l’Eure la trentaine de convives participant à la 6e édition de l’Aberlour Hunting Club. Une expérience exclusive qui proposait, les 3, 4 et 5 novembre derniers, le mariage du gibier et du single malt écossais.

Succédant à de grands chefs comme Emmanuel Renaut ou Gordon Ramsay, le chef triplement étoilé de “L’arpège”, qui possède au Bois-Giroult l’un de ses trois potagers, retourne vite à ses superbes fourneaux à bois La Cornue, installés sous une immense cheminée de briques. Là, volailles, gibier, chicons braisés et jus vert attendent patiemment de régaler l’assistance.

Pour accompagner l’Aberlour 35 ans servi à l’apéritif, le chef distribue des petits toasts de pain grillé, garnis d’une terrine maison de canard fumé aux épices. Durant le mois de décembre, celle-ci sera proposée chez les cavistes français qui feront déguster à leurs clients la gamme Aberlour.

Si ce single malt du Speyside est encore peu connu chez nous, il est le premier sur le marché hexagonal. Et la marque, dans le portefeuille du groupe Pernod-Ricard, entend bien s’implanter plus profondément sur nos terres. Pour ce faire, sera organisé, les 17 et 18 décembre prochains, un premier Aberlour Hunting Club belge, confié aux jeunes chefs flamands Kobe Desramaults (« In de wulf »*) et Jason Blanckaert (« J.E.F. »).

Bienvenue au potager de “L’arpège”

“Les affaires, c’est pour la rue de Varenne. Ici, c’est pour les camarades. On est dans le potager de “L’arpège”. L’Eure est un bon terroir argileux pour le navet et la betterave. On a 5 ha et 5 jardiniers. Et pas question de tricher avec les saisons. On n’a des tomates que trois mois par an, quatre cette année parce qu’on a eu un beau mois de septembre. Ma cuisine est forcément de saison car un jardin, c’est un rendez-vous”, explique Passard, tout sourire en invitant à passer à table.

On sent le chef passionné quand il s’agit de parler de ses chers légumes, dont il s’est fait une spécialité depuis une quinzaine d’années. Le challenge de cuisiner du gibier était donc d’autant plus intéressant à relever. “C’est vrai qu’on m’a déstabilisé en me demandant d’oublier mes carottes. Les gens ne le savent pas mais je suis rôtisseur  ! Dans les années 90, “L’arpège” était une rôtisserie; on y venait pour le tissu animal. Et il y a toujours de la viande à la carte, une belle volaille, un canard ou un quasi de veau. En tout cas, ce soir, on va vous régaler  !”

Un chef aux fourneaux

Star de la gastronomie française, Alain Passard ne joue pas les divas. Il semble heureux de recevoir chez lui. Et pas question de laisser tout le travail à ses petites mains. Le chef aura réellement passé toute la soirée derrière ses casseroles pour ce menu 6 services. Pour chaque plat, Ann Miller, sympathique “brand ambassador” internationale d’Aberlour, aura tenté d’associer le meilleur whisky possible.

Pour le chaud-froid d’œuf aux quatre épices et sirop d’érable, elle sert ainsi un Aberlour 15 ans “Reserve Select”. Histoire de se mettre en jambe.

Mais les choses sérieuses débutent avec un Aberlour 2005 “White Oak”, un whisky jeune vieilli en fût de chêne blanc, dont les notes de vanille et de fruits frais fonctionnent parfaitement avec un magnifique homard bleu de Chausey grillé “à l’armoricaine”. Un plat aux saveurs puissantes, avec ses coquillages, ses lamelles de calamars et sa sauce iodée.

Passard en mode classique

Pour le premier plat de gibier. Passard propose une dragée de marcassin aux endives confites avec une sauce à l’hydromel. Un plat un peu trop doux peut-être, d’autant que l’Aberlour 16 ans “Double casked matured” en rajoute sur le sucré avec son double vieillissement en fûts de Bourbon et de xérès oloroso. “On n’a pas de sanglier en Ecosse, commente Ann Miller. Mais c’est aussi une région de chasse, avec du faisan, de la grouse, de la perdrix, du chevreuil et du cerf. Tandis qu’avant la chasse, jusque fin septembre, on pêche le saumon dans la rivière Spey…”

Depuis quelque temps, dans l’univers du single malt, c’est sur les fûts que se joue désormais le marketing, et non plus sur l’âge. On ne s’étonne donc pas de découvrir un double vieillissement identique pour l’Aberlour 18 ans, qui accompagne l’un des plats “signature” de Passard, un superbe “corps à corps de gibier haute couture”. Soit un demi-faisan et un demi-colvert recousus ensemble avant cuisson pour ne former qu’une seule volaille. Tendres à souhait, les viandes sont présentées avec des épinards farcis et une purée de cormes du jardin, des fruits rares ressemblant à de petites poires.

Un dessert copyright

Avant de pouvoir enfin rejoindre ses invités pour se poser un peu en tirant sur un énorme cigare et en sirotant un verre d’Aberlour “A’bunadh” – un single malt non coupé titrant à 60 %, vieilli uniquement en fut d’Oloroso, en souvenir des débuts de la distillerie en 1879, quand elle n’employait que des fûts arrivés d’Espagne pour le transport du sherry –, Passard nous aura encore régalés de deux desserts.

Son “Bouquet de roses” (dont l’intitulé et le “modèle” ont été déposés   !) est une tartelette de pommes et caramel lacté. Que c’est simple. Que c’est bon  ! Tandis que, tout aussi classique, sa torche aux marrons meringuée est une variation sur le Mont-blanc d’une incroyable gourmandise.

Ou le plaisir de découvrir un prince de la gastronomie française, loin de son “Arpège” étoilé, en revenir presque à la cuisine traditionnelle …