Lundi soir, en streaming dans le monde entier, les foodies ont suivi en direct l’événement tant attendu chaque année par la planète Gastronomie : le dévoilement du classement “Fifty Best”, organisé depuis 2002 par le groupe de médias britannique William Reed et qui recence les 50 meilleurs restaurants du monde. Pour la petite histoire, “El Can San Roca” des frères Roca (photo) à Gérone récupère cette année la première place du podium, devant “L’Osteria francescana” de Massimo Bottura à Modène et le “Noma” de René Redzepi à Copenhague. Tandis que la liste ne compte plus aucun Belge. Le jeune Brugeois Gert De Mangeleer (“Hertog Jan”) ne figure qu’à la 53 place, juste devant Peter Goossens du “Hof Van Cleve”.

Fifty Best, 50 meilleurs restaurants du monde, El Can San Rocca

Fronde en France

Encensé par la presse anglo-saxonne, ce classement britannique est de plus en plus contesté, notamment en France, pays assez modestement représenté, avec 5 restaurants dans le Top 50, contre, par exemple, sept pour l’Espagne, six pour les Etats-Unis ou… trois pour le Pérou (pays partenaire du classement) et pour le Mexique.

Au-delà de ces considérations chauvines, les attaques portent également sur les critères retenus pour mettre au point cette liste, qui seraient opaques et pas strictement gastronomiques. Son jury se compose de plus de 900 professionnels (critiques gastronomiques notamment) répartis dans 26 régions du monde, qui doivent donner leurs 7 adresses favorites, dont trois en dehors de leur zone. Cela se complique quand on sait que parmi ces professionnels, on compte de nombreux chefs, forcément juges et partis. Sans compter que le Fifty Best ne paye ni la note, ni les frais de déplacement (parfois à l’autre bout de la planète) vers ces restaurants difficiles à réserver pour le commun des mortels.

Lundi, une pétition en ligne, signée par exemple par Joël Robuchon, a même été lancée, appelant les partenaires publics et privés à se désolidariser de ce classement qui “mêle partialité et machisme décomplexé” et qui impose ses codes : “dictature du marketing, starification des chefs et prime à l’emploi d’ingrédients innovants”.

Un cliché des tendances du moment

S’il ne faut pas minimiser l’impact médiatique colossal de ce classement, il faut le prendre pour ce qu’il est : pas le classement des 50 meilleurs restaurants du monde. Plutôt un cliché des tendances actuelles, le reflet des humeurs d’une jet-set culinaire qui a les moyens de s’envoler d’une table gastronomique à l’autre, de Lima à Tokyo, de New York à Gérone… Mais aussi de la puissance de frappe du lobbying de régions du monde comme la Scandinavie, la Catalogne, la Flandre ou le Pérou qui font tout pour imposer leur gastronomie au sommet d ela hiérarchie mondiale.