7a7f69942f806de59cb7530b5c23c2aa.jpgFugu (photo), truffe blanche d’Alba, caviar d’Iran, safran de la Mancha, etc. Il est de ces produits rares que le gourmet se doit d’avoir goûté au moins une fois.

Article publié dans La Libre du 3 mai

Le gastronome averti dresse parfois la liste des produits qu’il aimerait avoir dégustés au moins une fois dans sa vie. Même s’ils sont souvent chers, il fera tout pour mettre la main sur ces aliments rares, voire introuvables, car il s’agit de saveurs remarquables qui manquent à son répertoire gustatif. Boutargue, ormeaux, yuzu…

Ces produits d’exception se dénicheront plus facilement dans certains grands restaurants, les chefs disposant de fournisseurs à même de leur proposer des ingrédients uniques. Mais parfois, au détour d’une épicerie fine ou lors d’un voyage, le gourmand pourra toutefois tomber lui-même sur la perle rare. Il s’agira de la découverte d’un élément de sa liste imaginaire ou tout simplement d’une épice, d’un poisson, d’un légume peut-être moins couru mais original. Car à l’autre bout du monde, voire beaucoup plus prêt de chez soi, dans une région particulière, on tombe parfois sur des ingrédients totalement inconnus. Qu’au final, on soit déçu ou pas importe peu; voilà une saveur de plus à sa collection personnelle…

 

La boutargue

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La boutargue ou poutargue est constituée d’œufs de mulets salés, séchés et pressés, emprisonnés dans une fine gangue de cire pour éviter toute oxydation. Spécialité de Martigues (Provence) mais produite également dans d’autres pays méditerranéens, c’est un produit artisanal fabriqué par quelques entreprises familiales. Les œufs forment une masse compacte de couleur ambrée et peuvent être consommés dès la fin de leur séchage; ils seront alors souples. On découpera de très fines tranches – arrosés ou non de jus de citron – que l’on dégustera à l’apéritif. Mais on appréciera aussi la boutargue plus âgée. Elle aura foncé et durci, et s’accommodera, râpée, sur des pâtes avec un filet huile d’olive et quelques tomates fraîches.

Sa saveur marine puissante ne séduira pas tout le monde et il faudra faire attention à bien la doser. Elle coûte en moyenne 140 € le kg. Ce qui fait son prix ? La raréfaction des mulets de Méditerranée et la nécessité de s’approvisionner en poissons d’excellente qualité notamment en Mauritanie.

 

Les ormeaux

1c6427bfdc81aa62c8be7601c3324dae.jpgL’ormeau, abalone ou “oreille-de-mer”, car la forme de la coquille de ce gastéropode marin rappelle celle d’une oreille, est un coquillage typique de la côte nord de la Bretagne. Il lui faudra au moins deux ans pour teindre 4 cm, taille à laquelle on le consomme, mais il peut vivre quinze ans. Le muscle intérieur doit être paré et battu pour l’attendrir avant de le déguster simplement poêlé dans du beurre, avec du sel et du poivre. En Bretagne, il existe depuis peu un élevage d’ormeaux au pied du phare de l’île Vierge. Cette truffe des mers coûte environ 100 € du kilo.

 

Le jambon Bellota

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Le Bellota est un jambon ibérique issu de porcs pata negra nourris exclusivement de glands – ce qui lui donne son goût particulier aux accents de noisette – et affiné pendant 24 à 36 mois. Le label Bellota est garanti par le Consorcio del Ibérico. Chaque jambon, dont on aura prélevé un échantillon de gras afin de déterminer la quantité de glands réellement consommée par la bête, est serti d’un bracelet inviolable numéroté.

La marque française Bellota-Bellota pousse le vice jusqu’à vendre ses pétales de jambon exclusivement découpées par un maître-trancheur, ou cortador, dont le nom (mais aussi la date de tranchage) est indiqué sur le paquet ! Cette merveille particulièrement fondante en bouche coûte environ 250 € le kg. On dégustera par exemple ces fines tranches de pata negra posées sur une purée montée à l’huile d’olive.

 

Le yuzu

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Le yuzu est un agrume originaire de Chine et cultivé au Japon. Il s’agit d’une sorte de pamplemousse de petite taille à la peau moins lisse et avec de nombreux pépins, dont le goût oscille entre le pamplemousse, le citron vert, le cédrat et la mandarine. Sa teinte peut varier du vert au jaune selon sa maturité. Si le fruit frais est quasi impossible à trouver en dehors du Japon, on mettra plus facilement la main sur du jus concentré de yuzu dans les épiceries japonaises (env. 15 € les 200 ml).

A Paris, le pâtissier Sadaharu Aoki utilise avantageusement le yuzu pour parfumer des crèmes qui garnissent des éclairs ou des macarons. Excellent en pâtisserie, il est également utilisé côté salé. Son zeste sert à parfumer le poisson ou les soupes. Au Japon, il entre également dans la composition de la sauce ponzu – à base de vinaigre de riz, de mirin (saké doux), de flocons de bonite, d’algue kombu –, à laquelle on ajoute parfois de la sauce soja, qui accompagne notamment les tempuras ou les sashimis.

Il est impossible de dresser une liste exhaustive, mais on pensera aussi à la fleur de sel de Guérande, au vieux vinaigre balsamique traditionnel de Modène, au poivre sarawak, aux pibales (les alevins de l’anguille), au fugu (ce poisson aux gonades et au foie contenant un poison 1000 fois plus puissant que le cyanure), à l’omble chevalier (un poisson des eaux douces des hauts lacs alpins), à la ventrèche de thon rouge, au turbot, à la bécasse, à l’ortolan (même si sa consommation reste interdite), à la palombe, à la poularde de Bresse, au bœuf Wagyu de Kobe (nourri à la bière et massé), au chocolat de la fève criollo…

   

Envie de lecture ?

“Tout ce que vous devez avoir goûté au moins une fois dans votre vie”, publié en 2003 par Sylvia Gabet (textes) et Eric Frechon (recettes) aux éd. du Chêne (184 pp., env. 39,90 €).