La raviole du Dauphiné est une spécialité de Romans-sur-Isère et du Pays du Royans dans la Drôme. Elle bénéficie d’une « appelation d’origine » depuis 1989, d’un Label Rouge depuis 1998 et du label européen IGP depuis 2009. Si on trouve des paquets de ravioles au rayon frais de la plupart des supermarchés français, chez nous, les raviolis italiens ont le monopole. Elles se différencient de ces derniers par leur taille tout d’abord, puisqu’une raviole est un petit carré d’1 cm de largeur; elles se présentent d’ailleurs sous forme de plaques. Elles diffèrent également par leur extrême fragilité. Leur pâte extrêmement fine ne nécessite en effet pas plus d’une minute de cuisson. Leur farce aussi est unique. Il s’agit d’un mélange de Comté ou d’Emmental (des fromages qui ne sont pas de la même région, elle n’a donc pas droit à l’AOC!), de fromage blanc et de persil. Aujourd’hui, certaines marques proposent toutefois des ravioles aux garnitures plus variées mais moins authentiques, qui ne bénéficient donc ni de l’appellation, ni du Label Rouge…

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Certains prétendent que, dès le Moyen Age, on a consommé, au moment du Carême, des ravioles dans la région du Dauphiné. Mais le nom de « raviole » serait venu plus tard, du fait qu’elles étaient alors farcies d’un hachis de raves, ou de l’influence du mot italien « ravioli », qui renvoie à l’action de replier la pâte autour de la farce. D’ailleurs, d’autres rapportent que ce sont des ouvriers italiens piémontais immigrés dans la zone qui auraient inventé la recette! On dit aussi qu’elles auraient été importées dans le Dauphiné lors des voyages de soldats revenant d’Italie pendant les guerres du XVIe siècle.

Bref, comme pour beaucoup de produits traditionnels, on hésite sur la paternité du bébé! Mais ce qui est certain, c’est que Boccace, dans son Decameron (1350), lui fait honneur en la mentionnant et que, bien plus tard, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, apparaissent les fameuses ravioleuses. Des cuisinières qui se déplacaient de maison en maison pour vendre leurs ravioles. A la veille des fêtes, elles confectionnaient jusqu’à une vingtaine de « grosses », l’unité de mesure de la raviole, une grosse représentant pas moins de 144 ravioles! Au moment du repas, on servait généralement de la volaille bouillie et des légumes et on mangeait ensuite les ravioles, que l’on pochait dans le bouillon de cuisson de la viande. Un peu comme pour le tapioca dans le bouillon du pot-au-feu. Aujourd’hui, le marché industrialisé de la raviole représente en France 5000 tonnes par an!

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Des ravioles préparées avec une fondue de poireaux,
quelques lardons et un filet de crème.

Le critique gastronomique Gilles Pudlowski (journaliste au Point et auteur du très chouette guide Pudlo) nous apprend même que, jadis, à la place du Comté, les Dauphinois utilisaient du fromage de chèvre. Mais qu’on l’a délaissé car il était trop cher! Pudlo conseille notamment d’aller les déguster chez le chef trois étoiles Guy Savoy, originaire du Dauphiné. Mais il donne aussi quelques adresses de producteurs de ravioles (voir ci-dessous).

La façon traditionnelle de préparer les ravioles consiste à les pocher 1 minute dans un bouillon de poule. Mais attention, l’eau ou le bouillon ne doivent pas bouillir, juste être frémissants, sinon les ravioles risquent de partir en fumée… Pour les plonger dans l’eau, il faut glisser les plaques de pâtes avec leur papier, en prenant garde de ne pas se brûler (hein Le garçon!), qui s’ôtera tout seul. Mais on peut aussi les frire à la poêle ou dans un bain de friture pour les servir à l’apéritif, dans une salade ou comme accompagnement original. On peut aussi, mais c’est un peu lourd, les utiliser pour farcir une quiche ou, mieux, en faire des gratins en les associant avec de la crème, des poireaux et du saumon fumé par exemple. C’est en tout cas bien pratique les soirs de semaine où l’on a un peu la flemme…

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Pour les réaliser soi-même, il faudra s’équiper d’un moule à ravioles pour obtenir des carrés bien uniformes car elles sont trop petites pour utiliser la roulette. Sinon, on pourra toujours en réaliser de plus grands modèles mais elles perdront alors un peu de leur charme et se métamorphoserons en raviolis! Même s’il semblerait que, du temps des ravioleuses et avant l’invention de la première machine à ravioles, en 1930, elles étaient plus grandes, 2 cm environ.

Pour la confection des ravioles, si on s’en réfère à la demande d’enregistrement à l’IGP, il faut de la farine de blé de type 45, des oeufs frais, de l’huile de palme (là, on choisira une autre huile végétale, car l’huile de palme est responsable de la déforestation en Indonésie, mais pas d’arachide non plus car elle est interdite par le cahier des charges), du Comté AOC ou de l’Emmental français Est-Central IGP, du persil, du sel et du beurre. On pourra également utiliser du poivre, facultatif mais autorisé!

Détail technique à savoir si on veut les réaliser soi-même, l’épaisseur de la pâte à ravioles est de 0,7 mm et contient de l’eau, contrairement au raviolis italiens qui n’en contiennent généralement pas. En outre, le persil doit être haché et revenu dans du beurre. Pour une Italienne, ça ne devrait pas être si sorcier à réaliser… Dès que je mets la main sur un moule, je m’y mets!

 

Ravioles de Royan 1.jpgQuelques adresses dans le Dauphiné:

  • Ravioles à l’ancienne
    Avenue du Vercors, 26190 Saint-Jean-en-Royans.
    Tél. : 00.33.4.75.47.52.50. Fax : 00.33.4.75.47.56.06.
  • Ravioles de la Mère Maury
    43 rue Félix-Faure, 26100 Romans.
    Tél. : 00.33.4.75.02.09.00. Fax : 00.33.4.75.05.99.17.
  • Saint Jean,
    Le plus gros producteur de ravioles!
    44 av. des Allobroges, 26106 Romans Cedex.
    Tél. : 00.33.4.75.05.83.30. Fax : 00.33.4.75.02.83.80.

Une fête?

  • La Fête de la raviole et de la pogne (autre spécialité locale) a lieu tous les ans le premier week-end de septembre à Romans.

Un très bon article:

A Bruxelles

  • On cherche toujours des ravioles… A bon entendeur, salut…