En revisitant de vieux plats de la gastronomie bruxelloise et brabançonne, Christophe Hardiquest est en train de forger une véritable identité à son “Bon Bon”. Sa nouvelle carte « Héritage » est en effet un voyage émouvant au coeur des saveurs de notre patrimoine culinaire trop peu exploité…

A la conquête d’un 3e macaron

Longtemps resté très discret, cantonné dans ses cuisines, Christophe Hardiquest a fait de son “Bon Bon” la meilleure table de Bruxelles (19,5/20 au Gault&Millau et deux étoiles au Michelin). Depuis son déménagement à Woluwe-Saint-Pierre en 2011, le chef dispose d’une infrastructure lui permettant de laisser libre cours à sa créativité. Et ce n’est un secret pour personne qu’à l’instar de Sang-hoon Degeimbre pour la Wallonie, Christophe Hardiquest espère rendre un jour un trois-étoiles à Bruxelles…

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Depuis quelques années, il a d’ailleurs accepté le jeu de la médiatisation internationale. Il a ainsi participé au projet de restaurant du grand chef Corey Lee du “Benu” au nouveau “Moma” de San Francisco. Tandis qu’il participera, le 10 novembre prochain, au « Gelinaz Brussels HQ ». Organisé en parallèle au “Grand Gelinaz Shuffle 2” (où 40 chefs internationaux s’échangent leurs cuisines), l’événement verra défiler 20 chefs dans les cuisines de “Bon Bon”  : Albert Adrià (“Tickets”** à Barcelone), Mauro Colagreco (“Mirazur”** à Menton), Alexandre Gauthier (“La grenouillère”* à La Madelaine-sur-Montreuil), Kobe Desramaults (“In de wulf”* à Dranouter), la star italienne Fulvio Pierangelini, Gert De Mangeleer (“Herzog Jan”*** à Zeldegem), Yannick Alléno (“Pavillon Ledoyen”*** à Paris), Clare Smyth (ex-trois étoiles au « Gordon Ramsay », qui s’apprête à ouvrir son restaurant à Londres) ou encore Mathieu Rostaing-Tayard (du « Café Sillon » à Lyon).…

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Une recherche d’identité

Si Christophe Hardiquest a désormais acquis une réputation internationale, reste que, pour passer le cap de la troisième étoile, il faut ce supplément d’âme qui fait passer un grand restaurant à une table exceptionnelle. Un parcours initiatique qui mène un chef à s’inventer une identité unique. Conscient du défi à relever, Hardiquest a remis sa cuisine en question. A la base de sa réflexion, une constatation  : “Quand je mange dans les grands restaurants à travers le monde, j’ai l’impression d’assister à une globalisation de la cuisine. J’ai moi-même suivi cette tendance mais je pense que les cuisiniers se perdent… On travaille tous les mêmes produits  : homard, foie gras, bœuf wagyu… Je me suis rendu compte que j’avais fait le tour du bar, du turbot et de la langoustine, des produits que j’ai adorés. Partout, les chefs ressentent le besoin d’un retour à une vraie identité, de retrouver leurs racines, de savoir d’où ils viennent. Moi, je suis Bruxellois depuis 20 ans… Avec les attentats et tout ce qu’a connu Bruxelles ces derniers mois, j’ai eu envie de faire quelque chose…”

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Résultat de huit mois de recherches – avec l’aide du chroniqueur gastronomique Philippe Bidaine et de l’historienne de la cuisine Liliane Plouvier, qui lui ont notamment fait découvrir les ouvrages de Gaston Clément, ancien chef du roi et chroniqueur gastronomique à la RTBF mort en 1973 –, la carte “Héritage” a fait son apparition il y a 15 jours chez “Bon Bon”. Une carte qui revisite des plats traditionnels bruxellois et brabançons traditionnels, et plus largement belges, à la sauce Hardiquest. “On va alléger les recettes, moderniser ces plats anciens avec toutes les dernières techniques disponibles pour tenter de proposer une vraie cuisine d’avant-garde bruxelloise.” Ainsi, le midi, “Bon Bon” propose désormais un amusant menu poulet “Kiekefretters”. Un travail en 5 ou 10 serv. (70 € ou 120€) autour du Coucou de Malines.

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Réinterpréter le terroir bruxellois

Si travailler uniquement avec des produits locaux est difficile en Belgique, Christophe Hardiquest essaye d’en utiliser un maximum, que ce soit les légumes (à 95  % bio) mais aussi les poissons ou la viande. “J’étais hier à la Criée avec Filip Claeys du “Jonkman” à Bruges. C’est incroyable la variété de poissons que nous avons et que la plupart des chefs ne connaissent pas  !”, s’enflamme le chef.

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Son nouveau menu s’ouvre ainsi par de formidables fritures bruxelloises (32  €), toutes plus raffinées les unes que les autres : croquettes de hareng fumé puis de moules, samoussas aux crevettes épicés, fondus au fromage… Où l’on prend conscience du travail effectué pour repenser ces classiques et leur donner une nouvelle dimension.

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Des moules parquées limpides

Ainsi, hyper moderne, sa “tomate-crevettes” (38  €), proposée en deux services, conserve des saveurs affirmées de tomate même si celle-ci n’apparaît qu’en granité, tandis qu’on ajoute de l’avocat pour amener un peu de rondeur.

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Mais c’est avec sa “moule parquée à la marolienne” (35  €) qu’Hardiquest prouve qu’il a trouvé sa voie en s’imposant ces nouvelles contraintes identitaires. Enrobées dans une formidable gelée de consommé de moules, les moules sont tout simplement parfaites, avec une fine brunoise de céleri, du pain noir pour rappeler les coquilles des mollusques et une petite mousse moutarde-vinaigre-échalote. Un plat précis et limpide  !

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Braisée longuement à la bière, sa joue de bœuf (42  €), à la fois rosée et fondante, est sublime, présentée de façon picturale sur assiette avec un croustillant de pain à la moutarde, de la purée de carotte et surtout une puissante extraction de bœuf a faro de la brasserie Cantillon. Soit une géniale réinterprétation des carbonnades flamandes  !

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Diffuser la cuisine bruxelloise

Le 27 septembre prochain, Christophe Hardiquest a convié deux chefs – Inaki Aizpitarte du “Chateaubriand” à Paris et Leonardo Pereira, un ancien du “Noma” – à travailler avec lui sur cette Nouvelle cuisine bruxelloise lord d’un dîner à six mains (déjà sold out). Le premier d’une série de repas conçus avec des chefs internationaux destinés à mieux faire connaître à l’étranger les plats de la tradition bruxelloise mais aussi ses ingrédients.

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Lors de ce dîner, le chef de “Bon Bon” proposera par exemple une inventive déclinaison sur le chou de Bruxelles (en glace, sphérification ou encore une formidable soupe…) ou encore, en un dessert tout en fraîcheur, une réflexion sur la maquée aux fines herbes. Soit une composition autour du fromage frais de Beersel (travaillé en Fontainebleau) et des herbes du jardin.

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Christophe Hardiquest parviendra-t-il à conquérir les sommets du Michelin ? On ne peut en être sûr, mais une chose est certaine, sa cuisine a atteint un nouveau palier en revisitant le patrimoine culinaire bruxellois et elle n’a jamais procuré autant d’émotions…

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Envie d’y goûter?

=> “Bon Bon”. 453 av. de Tervueren, 1150 Bruxelles.
Fermé lundi midi, samedi, dimanche et jours fériés.
Lunch 3 serv. 95€ (135€ avec les vins). Menus 5 serv. 175€ (235€ avec les vins) et 7 serv. 220€ (330€ avec les vins).

Rens. : www.bonbon.restaurant ou 02.346.66.15.