En cette fin d’été, nous vous proposons une balade gourmande dans le Sud de la France. Première escale à Lyon. Des bouchons à Bocuse, la Porte du Sud est bel et bien la capitale de la gastronomie française! Suivront les alentours du Mont Ventoux, les Alpines et le Lubéron, Marseille et la Camargue et le Quercy et le Périgord, à la découverte des richesses de la gastronomie régionale française.

Petit tour dans le Sud de la France

• 6 août: Lyon, des bouchons à Bocuse

• 13 août: la Drôme provençale et le Mont Ventoux

• 20 août: le Lubéron et les Alpilles

• 27 août: Marseille et la Camargue

• 3 septembre: le Quercy et le Périgord

Un bouchon, c’est un patron  !

Ah, Lyon et ses bouchons ! L’association semble idéale. Mais si les bouchons sont légion dans la capitale des Gaules, il n’est pas facile de dénicher la perle rare entre les pièges à touristes et les lieux sans âme. D’autant que le nom “bouchon” n’a pas vraiment été protégé : n’importe qui peut ainsi vendre n’importe quoi et s’afficher comme “bouchon”…

La guerre des bouchons

Malheureusement, le label “Les bouchons lyonnais”, créé en 2012 par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Lyon en partenariat avec Lyon Tourisme, n’est pas assez restrictif. Aussi, nombre de vrais bons bouchons ont refusé d’y adhérer, provoquant ce qu’on a appelé la “guerre des bouchons”…

Alors, comme tout le monde, on s’est cassé les dents. Le Café Comptoir Abel, une institution, nous a bluffés par son sublime décor d’époque et ses quenelles de brochet maison (à base de pâte à chou !), mais rien de renversant pour le reste.

Tandis que Daniel & Denise – déjà trois adresses au compteur pour le MOF (meilleur ouvrier de France) Joseph Viola – nous a véritablement laissé de marbre. OK, le pâté en croûte qui lui a valu un titre de « champion du monde » est pas mal (mais bien moins bon que celui de Karen Torosyan à la Bozar Brasserie) mais le reste est quelconque. A commencer par le gras double et la quenelle sauce Mantua. Sans même parler des accompagnements vraiment très quelconque. Alors, c’est ça les bouchons lyonnais ? Oh que non !

 

Des lieux avec une âme

Outre un menu typiquement lyonnais (cochonnailles, salade lyonnaise, gras double…), l’âme du bouchon, c’est véritablement son patron (ou sa patronne). C’est lui qui fait du bouchon une expérience unique, où convivialité et générosité doivent être au rendez-vous. Qu’il soit derrière le zinc, affairé en cuisine ou à faire la causette avec les clients, on veut le voir ce patron ! Et puis, bien entendu, il y a la sincérité de la cuisine, basée sur des produits authentiques et de qualité, comme la rosette et le jésus de chez Bobosse ou le saint-marcellin de la Mère Richard.

Nos deux perles, on les a dénichées dans la même rue, à deux pas de la place des Carreaux en plein centre-ville. Ce midi-là, comme tous les midis, Le Garet était plein à craquer. Mais Emmanuel Ferra et sa femme Agnès, à la tête de ce bouchon depuis 15 ans, ont un sacré sens de l’accueil. On se sent tout de suite bien ici.

 
Pot lyonnais et gratons, tétine de vache en persillade. Pas de doute, « Le garet » est un
vrai bouchon lyonnais!

D’autant que tout fait envie à la carte et dans les suggestions. Tandis que le lunch est à 19,50€ seulement. Générosité on a dit ! Ce sera finalement des grenouilles et de la tétine de vache en persillade, suivies d’une andouillette. Tout est bon à se damner. Et les grenouilles (23€) sont servies en deux fois ; il ne faudrait surtout pas que ça refroidisse !

Après un excellent flan au caramel, c’est la larme à l’œil que l’on quitte l’endroit, repus. Et résonne encore à notre oreille la modestie d’un patron qui a travaillé chez Bocuse et chez Joseph Viola : “Je veux simplement faire plaisir, défendre une identité du bien-manger et du bien-vivre !”

 

Le mâchon: des tripes à 9h du mat’?

Quand on a trouvé le bouchon parfait, ne reste plus qu’à demander une recommandation pour le suivant. Et c’est le voisin d’en face qui est désigné sans hésitation : Au Petit Bouchon Chez Georges. C’est donc chez lui qu’on réserve le lendemain matin pour “mâchonner” (25€), une expérience typiquement lyonnaise.

Au poste dès 9h, Marc Gorgette n’a ouvert que pour nous. Charismatique et gouailleur, il a repris en 2007 cette institution où est née la confrérie des Francs-Mâchons en 1964. La tradition du “mâchon” vient des canuts, tisserands de soie du quartier de la Croix-Rousse, qui partageaient des repas traditionnels lyonnais dès l’aube, après leurs heures de travail.

Et “Chez Georges”, on respecte la tradition : grattons sur la table, rosette, pâté de tête maison et, bien entendu, le “pot lyonnais”, rempli par exemple d’un excellent beaujolais régnié.

Au menu ce matin-là : tablier de sapeur (estomac de bœuf mariné au vin blanc pané et frit) sauce gribiche, andouillette à la moutarde, saint-marcellin cervelle de canut (fromage blanc aux fines herbes, échalotes et vinaigre). Même pas peur ! Tout cela s’ingurgite goulûment.

 

 

Et c’est tellement bon, qu’on se demande déjà quand on reviendra à Lyon… En 2018 ! Pour l’inauguration au bord du Rhône, dans le sublime Hôtel-Dieu, de la Cité internationale de la gastronomie.

Envie d’y goûter?

=> Le garet. 7 rue du Garet, 69001 Lyon. 
Tél. : +33.4.78.28.16.94.

=> Au Petit Bouchon Chez Georges. 8 rue du Garet, 69001 Lyon. 
Infos : www.aupetit-bouchon-chez-georges.fr ou +33.4.78.28.30.46.

Autres adresses

 

Le temple de la gastronomie française: Paul Bocuse

Aller chez Paul Bocuse, c’est croquer un moment d’Histoire et un grand moment d’émotion quand on casse la croûte de la soupe V.G.E., que l’on voit arriver la volaille de Bresse en vessie ou le défilé des desserts d’autrefois… Et le lien avec la tradition lyonnaise est bien présente puisqu’on trouve ici à la carte des quenelles sauce Mantua ou joli sorbet des vignerons…

=> Récit de notre visite

Un restaurant dans le vent: Café Sillon

Dans son petit bistrot de copains installé dans un quartier excentré de l’autre côté du Rhône, Mathieu Rostaing-Tayard propose des menus raffinés (3-4 serv. ; 38-45€) qui tranchent avec la cuisine traditionnelle lyonnaise, accompagnés de flacons de vignerons indépendants de la région, entre beaujolais et côtes-du-rhône. La cuisine est franche, fraîche et dans l’air du temps. Avec par exemple un poulpe au barbecue, un cochon fermier, artichauts poivrade et abricots, un filet de lieu jaune, fleur de courgettes et coques ou un biscuit de sarrasin, confiture de tomates vertes et sorbet d’oxalis. On adore  !

 

 

=> 46 av. Jean Jaurès, 69007 Lyon.
Rens.  : www.cafe-sillon.com ou +33.4.78.72.09.73.

Un caviste ancestral: Maison Malleval

Trônant en plein cœur de la Presqu’Île, “Malleval” est l’une des plus anciennes caves de Lyon, doublée d’une belle épicerie fine. Ses caves enterrées recèlent des trésors (Pétrus, Romanée-Conti, Armagnac du XIX^e siècle…) mais on peut se faire plaisir à tous les prix. Au total, 5 000 références, avec un focus particulier sur la Vallée du Rhône, évidemment. Le rayon spiritueux propose également une très belle sélection (pastis, absinthes, crèmes de cassis…).

=> 11 rue Emile Zola, 69002 Lyon.
Rens.  : www.malleval.com ou +33.4.78.42.02.07.

Un marché gastronomique: les Halles Paul Bocuse

Une visite des Halles s’impose pour comprendre pourquoi Lyon est considérée, selon la formule de Curnonsky, comme “la capitale française de la gastronomie” ! L’offre donne le tournis, entre les superbes volailles de Bresse, les viandes d’exception de la Boucherie Trolliet (MOF), les Jésus et les rosettes de la Charcuterie Sibilia, les succulentes andouillettes de chez Bobosse, les fromages de la mère Richard ou de chez Mons (MOF), les fines tartes aux pralines roses de chez Jocteur…

 

 

 

=> 102 cours Lafayette 69003 Lyon.
Rens. : http://bit.ly/HallesPaulBocuse ou +33.4.78.62.39.33.

Les mots de Lyon

Le bouchon

L’amusant nom de « bouchon » désignant les bistrots lyonnais viendrait de l’habitude qu’avaient autrefois les cabaretiers de signaler leur établissement par une botte de rameaux ou de branchages accrochée à leur porte. « Bousche », en vieux français, signifiant faisceau de branchages…

Le “pot” lyonnais, de 93 litres à 46 cl…

Dans un bouchon, on ne boit pas le vin en bouteille mais au “pot”, soit les pichets de vins du patron. Au Moyen-Age, le “pot” s’appelle l’“asnée” (la quantité de vin qu’un âne peut porter en un seul voyage) et contient 93 litres. Au XVIe siècle, c’est le “pot”; il est ramené à 2,08 litres. Au XVIIe siècle, il ne contient plus que 1,04 litre. Au XIXe (1843), il est fixé à 46 cl ou ½ pinte. Et depuis plus de 150 ans il fait partie de la tradition lyonnaise !

Je traboule, tu traboules, il traboule…

Lyon compte environ 500 traboules. Ces passages secrets qui traversent des cours d’immeuble reliant deux rues parallèles. A la Croix-Rousse, ils permettaient aux canuts de transporter les soieries à travers la ville en les protégeant de la pluie.

Le Vieux Lyon est d’ailleurs l’un des plus vastes quartiers médiévaux et Renaissance resté intact et parvenu jusqu’à nous. En 1998, le site historique de Lyon, territoire délimité par les anciennes fortifications de la ville, comprenant la colline de Fourvière ainsi qu’une grande partie de la Presqu’Ile, fut d’ailleurs inscrit au Patrimoine Mondial de l’Unesco.