Le vermouth vit une période de renaissance un peu partout en Europe. La tendance débarque aussi en Belgique, avec pas moins de trois vermouths fabriqués chez nous?

 

La renaissance du vermouth

 

Après le gin, voici la renaissance du vermouth ! Que ce soit en Italie, en France ou en Espagne, cet apéritif tombé en disgrâce dans les années 60 fait un retour en force sur le marché des spiritueux. Preuve en est qu’aujourd’hui, comme pour les autres alcools, des produits “premium” on fait leur apparition. En 2013, Martini lançait ainsi le formidable “Martini Gran Lusso”, pour fêter les 150 ans de la marque de vermouth la plus connue dans le monde. Tandis que chez nous, même la grande distribution s’y met (cf. ci-dessous)…

Ce regain d’intérêt est lié à l’univers de la mixologie, lui aussi en plein essor. En effet, les barmen n’ont jamais cessé d’utiliser le vermouth, qui entre dans la composition des cocktails les plus connus : le dry martini, le negroni, le manhattan… D’ailleurs, les bartenders sont nombreux à préparer des vermouths maison pour agrémenter leurs créations, comme Matthieu Chaumont chez “Hortense”. Olivier Jacobs, du “Jigger’s” à Gand, a, lui, créé un faux vermouth à base de bière IPA et d’aquavit, infusé aux aromatiques.

Un faux vermouth car la législation européenne définit le vermouth (qui titre en général entre 16 et 21 degrés d’alcool), comme un vin aromatisé préparé à partir de vin (75 %), d’alcool (éthylique d’origine viticole, distillat de vin ou de raisins secs, eau-de-vie de vin ou de marcs de raisins…), de sucre (caramel, saccharose ou moût de raisin), dont le goût caractéristique est obtenu par l’ajout d’herbes aromatiques et d’épices. Parmi elle, on doit obligatoirement retrouver des espèces d’artemisia (“vermouth” vient d’ailleurs du mot “wermut”, armoise en allemand). Un genre riche, comprenant l’absinthe mais aussi l’estragon ou les génépis.

Trois vermouths belges

 

Forest Vermouth, le plus élégant

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Sommelier et propriétaire du restaurant “The Glorious”* et du bar “Burbure” à Anvers, Jurgen Lijcops a lancé le premier vermouth belge en janvier 2015, après avoir créé une gamme de gins premium saisonniers distillés dans le domaine “Forest” près d’Anvers.

Lijcops a profité de son expérience de sommelier et de ses contacts pour se procurer un vin blanc de base de qualité, une malvasia bio de Montepulciano de la maison Avignonesi en Toscane, et des fûts de chêne de pomerol et de sauternes, où il fait vieillir son vermouth trois à quatre mois minimum.

Mais ce qui fait la grande complexité de son vermouth, édité à 5 000 bouteilles par an, ce sont les 52 plantes (dont l’absinthe et la gentiane), épices et fruits frais qui sont macérés individuellement dans l’alcool neutre pour maîtriser la puissance de leur parfum lorsqu’ils seront réunis. Jurgen aime parler de son vermouth comme d’un grand plat  : “Chaque ingrédient doit être d’une qualité exceptionnelle pour obtenir cette richesse, cette puissance, cette longueur en bouche.”

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le produit est très réussi. Si, dans les premières bouteilles, le clou de girofle était trop marqué, Lijcops a su rectifier le tir avec une nouvelle version plus équilibrée, qui n’a rien perdu de son identité, ni de son élégance. Et on l’apprécie même seul, avec de la glace et un zeste de citron.

On attend déjà avec grande impatience le vermouth rouge à base de grenache, qui devrait sortir des notes d’agrumes, de vanille et de cacao. Rendez-vous début de l’année prochaine.

=> Disponible chez les bons cavistes (29,99€/50cl, 20%).
Rens. : www.forest-spirits.com.

Kiss My, le plus fruité

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L’histoire est belle… Les grands-parents de Wouter (32 ans) et Niels (21 ans) Vandekerkhove possédaient un grand jardin près de Roulers, entre Courtrai et Bruges, où ils cultivaient des pommes de terre, des aromates, des fruits… L’été, ils récoltaient tellement de mûres, qu’après les confitures, il fallait bien trouver un autre moyen pour les utiliser. C’est ainsi que leur grand-mère, cuisinière dans une école, commença à confectionner des vins aromatisés…

“Au départ, nous n’avions pas l’intention de faire un vermouth, confie Wouter, mais des barmen nous disaient que notre produit était une sorte de vermouth et finalement, utiliser le mot vermouth était plus facile pour parler de notre produit.” Le “Kiss My” est en effet un vermouth complètement atypique, car s’il est à base de vin, les aromatiques sont finalement peu présentes et l’amertume quasiment absente. Bonne idée, ce sont surtout les fruits (15 kg pour 60 litres de vin), qui ressortent dans la version rhubarbe, à base de rosé, et dans la version mûre, à base de blanc. Des fruits que les deux frères cueillent eux-mêmes dans leur jardin, dans la nature ou qu’ils achètent chez des producteurs bio.

Très sucrés, ces vermouths ne sont pas idéaux à siroter seuls. Mais au “Hertog Jan”*** à Zeldegem, on marie le “Kiss My Rhubarb” avec du champagne, tandis que chez “Superette”, à Gand, on propose la version noix (à base de vin rouge), moins sucrée, avec du fromage.

La production est artisanale et minuscule (même pas 5 000 bouteilles pour les trois versions), ce qui explique le prix assez élevé. Même si le test cocktail est très réussi ! Le “Kiss My Blackberry” fait ainsi merveille marié au cognac, à l’Aperol et à l’absinthe.

=> 36,50€/50cl, 21%. Rens. et points de vente  : http://kissmy.be.

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On a beaucoup aimé le « Red Square » suggéré par Kiss My pour apprécier leur vermouth aux mûres: 20ml de Kiss My blackberry, 40ml de cognac VSOP, 15ml d’Apérol, 2 traits d’Angostura bitters, 2 traits de Peychaud bitters et 2 traits d’absinthe.

Belmouth, le plus belge

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Le 100 % belge. Début novembre, Delhaize lançait, en collaboration avec la distillerie de Biercée – connue entre autre pour la fameuse “Eau de Villée” – et le vignoble du domaine du Ry d’Argent près de Namur, le premier vermouth à base de vin belge  ! Une édition limitée à 5 000 bouteilles qui marque une nouvelle fois la volonté de la grande chaîne de distribution d’innover dans le secteur des alcools et des spiritueux et de travailler de plus en plus avec des producteurs locaux.

Après le Belgin, lancé en 2013, voici donc le Belmouth ! Si on peut regretter un nom pas très vendeur et une bouteille sans sex-appeal, le produit élaboré par la distillerie de Biercée est plutôt pas mal pour le prix. Inspiré par le maitrank, le plus connu des vins aromatisés belges, le maître distillateur Pierre Gérard a eu l’idée d’utiliser de l’aspérule odorante pour donner une signature belge à un vermouth plutôt classique mais avec une belle fraîcheur. “Je voulais aussi garder la typicité du cabernet jura de Jean-François Baele, son rosé fruité, aromatique, avec en bouche une belle acidité, explique-t-il. En Italie, quand on fait du vermouth, on écrase des petits vins pour les rendre buvables, moi je ne voulais surtout pas écraser le vin.”

Parmi les 13 ingrédients mélangés au vin fortifié, il y a aussi le houblon ou la racine de chicorée, qui ont macéré neuf semaines dans des fûts de chêne.

Ce vermouth fait par exemple merveille dans un negroni 100 % belge (photo), avec du gin et du bitter de Biercée. Mais attention à bien conserver votre bouteille au réfrigérateur, car le produit est fragile et doit être consommé assez rapidement.

=> En vente chez Delhaize (14,99  €/75 cl, 16 %).

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La recette du negroni 100% belge: 40ml de Belmouth, 40 ml de Less is More GiN (Biercée) et 40 ml Biercée Bitter.