Moins courue que New York ou même San Francisco, Boston offre une halte reposante et gourmande lors d’un voyage aux Etats-Unis, placé sous le signe de l’histoire, de la culture (Cambridge accueille non seulement l’une des universités les plus pretigieuses au monde mais aussi le célèbre MIT, Massachusetts Institute of Technology). A la découverte, aussi, des débuts de la cuisine américaine…

On dit souvent que Boston est la plus européenne des villes américaines. Sans doute parce qu’il s’agit d’une ville profondément marquée par l’histoire. Fondée en 1630, la capitale du Massachusetts a en effet gardé beaucoup de traces de son passé colonial et révolutionnaire. Cela se ressent dans son architecture mais aussi dans sa gastronomie…

La Nouvelle Angleterre est en effet le berceau de la cuisine américaine, cette cuisine Yankee connue pour ses spécialités de haricots (Boston est d’ailleurs surnommée “Bean Town”), son corn bread (pain de maïs), son Yankee Pot Roast (sorte de pot-au-feu)… Au début du XVIIe siècle, les échanges entre les tribus locales et les premiers colons anglais furent en effet plutôt harmonieux. Boston et sa région sont ainsi fiers de rappeler que c’est ici (à Plymouth pour être précis, un peu plus au sud) qu’a eu lieu le premier repas de Thanksgiving, partagé avec les Indiens. On était en 1621, un an après l’arrivée des premiers Pères pèlerins sur le Mayflower. Quand, au restaurant, on reçoit une purée de potiron ou un Indian pudding (un dessert à base de farine de maïs et de mélasse), c’est donc un peu d’histoire que l’on mange…

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Au-delà de ce folklore culinaire, pas spécialement désagréable d’ailleurs, on découvre rapidement que Boston est aussi riche gastronomiquement qu’historiquement. La tendance la plus marquée est, comme dans toute la Nouvelle Angleterre, l’accent mis sur les produits de la mer. Normal pour une ville qui fut d’abord un port important, notamment grâce à sa baie reculée, Back Bay… Le plat le plus emblématique, et toujours servi dans la plupart des restos bostoniens (et même désormais jusqu’à San Francisco!), est le fameux clam chowder, un potage de coquillages et de pommes de terre crémeux. Que l’on prononce et que l’on écrit parfois ici « chowdah », selon l’accent typique de Boston, qui fait volontier disparaître les « r »…

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A Boston, les clams se mangent souvent crus.
 

Des clams, cherrystones ou littlenecks (plus petits), que l’on retrouve sous toutes les formes : frits avec de la sauce tartare, vapeur et même crus. Partout à Boston, on trouve en effet des oysters bars dont le raw bar (bar cru) permet de déguster une grande variété d’huîtres et de coquillages. Des restaurants très fréquentés, qu’ils soient historiques – en activité depuis 1826, l’“Union Oyster House” est ainsi le plus vieux restaurant des Etats-Unis –, populaires (comme la chaîne “Legal Sea Food”), gourmet (comme le “Neptune Oyster” ou le « B&G Oyster ») ou même branchés (comme le tout nouveau “Island Creek”). On y sert également du fish & chips, du crabe et bien entendu du homard du Maine, véritable mascotte de la Nouvelle Angleterre. Notamment sous la forme de lobster roll, étrange hot-dog de homard (servi New England Style, avec de la mayonnaise, ou Connecticut Style, du beurre fondu) à essayer obligatoirement ! Car lorsque le homard est de qualité et bien cuit, il s’agit d’un véritable délice!

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La salle, très agréable du « Neptune Oyster »
 

Si Boston est connue pour sa forte communauté irlandaise, arrivée à la moitié du XIXe siècle – cela se remarque notamment à la présence de très nombreux pubs dans les rues –, si elle possède un Chinatown très riche (avec de nombreux restaurants chinois, coréens, japonais ou thaïlandais) ou une forte communauté lusophone (notamment installée à Cambridge), l’autre grande communauté présente ici est italienne. Le quartier le plus touristique de Boston, le North End, est ainsi un Little Italy qui, le long d’Hanover et Salem Streets, regorge de pizzerie, ristoranti, pasticcerie, salumerie… De nombreux restaurants italo-américains comme le célèbre “Giacomo’s »proposent ainsi des plats de pâtes aux fruits de mer comme l’emblématique « Lobster Fra Diavolo », un homard et des fruits de mers servis sur des linguine et agrémentés d’une sauce tomate pimentée. Une proposition typiquement italo-américaine, qui n’existe pas en Italie! Tandis qu’avec la pâtisserie “Mike’s Pastry”, les cannoli siciliens se sont imposés comme une spécialité de Boston !

Cette forte présence italienne se remarque également au nombre impressionnant de glaciers: « Toscanini’s », « Christina’s », « Emack & Bolio’s » ou « Picco », pour n’en citer que quelques-uns. De quoi faire dire à certains que Boston est la ville américaine où l’on mange les meilleures glaces ! Et que dire des nombreux carts présents dans les rues, proposant des slushes, plus connus sous le nom de granite (granités) dans la Péninsule.

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Ambiance d’osteria italienne au « Daily Catch »… 

Mais Boston ne croule pas sous ses traditions. Depuis les années 80, Boston vit une véritable révolution culinaire, marquée par un retour aux produits artisanaux et locaux, que l’on retrouve désormais partout. Notamment grâce aux farmers markets, qui se sont développés ces dernières années un peu partout dans le pays. Au printemps et en été, la très belle place de Copley Square accueille ainsi un magnifique marché de producteurs venus des campagnes de Nouvelle Angleterre avec leurs fruits, leurs légumes, leurs fromages… Tandis que des quartiers comme Back Bay, le South End et bien entendu Cambridge sont non seulement très agréables pour se promener mais regorgent également de petites boutiques gourmandes artisanales (pâtisseries, épiceries…).

Ayant longtemps vécu à Cambridge, de l’autre côté de Charles River, la star Julia Child – qui a popularisé la cuisine française aux Etats-Unis à travers ses livres et émissions de télévision sur ABC – a sans doute créé de nombreuses vocations chez les chefs de Boston. Depuis dix ans, on note en tout cas l’émergence d’une nouvelle génération marquée par les influences italiennes et françaises.

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C’est le cas notamment de Barbara Lynch (photo). Ayant grandi dans le quartier alors difficile de Fort Point (qu’elle a désormais réinvesti en ouvrant dans le même immeuble le très chic “Menton”, l’italien “Sportello” et le bar à cocktails “Drink”), Lynch a débuté la cuisine dès l’âge de 13 ans. Avant de se former réellement auprès de grands chefs de Boston à 20 ans ; elle est notamment passée par les cuisines de Todd English, au “Michaela’s”, au “Olives” puis au “Figs”. Récompensée d’un prix James Beard (les Oscars de la cuisine américaine), elle s’installe à son nom en 1998 au “N°9 Park”, considéré d’emblée comme l’un des meilleurs restaurants des Etats-Unis. Aujourd’hui, elle est à la tête de sept adresses très différentes à Boston, du “B&G Oyster” au “Butcher’s Shop” en passant par un bar, l’excellent « Drink », ou une librairie-espace culinaire “Stir” ! Membre du Bocuse d’or USA, auteur du livre de recettes à succès “Stir : Mixing It Up in The Italian Tradition”, multirécompensée, à 40 ans, Lynch est aujourd’hui à la tête d’un petit empire qui emploie plus de 200 personnes !

Mais d’autres noms ont déjà fait leur apparition sur la scène bostonienne, comme Kenneth Oringer (le chef des acclamés “Clio” et “Uni Sashimi Bar”) ou Tony Maws, qui fait sensation à Cambridge avec sa cuisine canaille américaine à Cambridge au “Craigie on Main” ! Eux aussi ont d’ailleurs aussi été récompensés par le James Beard Award du meilleur chef du Nord-Est des Etats-Unis…

Bref, traditionnelle ou dans le vent, Boston a de nombreux atouts dans sa poche pour séduire tous les gourmands.