Avec le Wolf, qui ouvrira ses portes ce samedi, Bruxelles s’offre enfin son premier food market digne de ce nom. Même si, ces dernières années, nombre de marchés traditionnels ont déjà évolué en ce sens, suivant la mode des food trucks. Il suffit de penser au marché du lundi soir de la place Van Meenen à Saint-Gilles ou à celui du mercredi soir au Châtelain, où l’on croise autant, sinon plus, de bobos venus se rincer le gosier en grignotant un bout sur une table haute que de vieille dames venus remplir leur cabas…

Une tradition millénaire

La marché est en effet millénaire et universel, présent de la Rome antique à la Chine impériale en passant par les royaumes arabes ou perses. Un des plus beaux exemple de cette tradition est sans doute le marché de la place Jeema El Fna au cœur de la médina de Marrakech. Tous les soirs, au coucher du soleil, la plus grande place d’Afrique est envahie de roulottes pour se transformer en un immense food court à ciel ouvert. Où l’on vient en famille, ou entre touristes, pour déguster avec les doigts des escargots, du méchouis, de la tanjia ou de la tête d’agneau, cervelle et langue comprises.

L’ouverture du Wolf s’inscrit dans un vaste mouvement de développement immobilier qui a fait émerger, dans toutes les grandes villes du monde, ces nouveaux marchés gourmands, inspirés des traditions méditerranéennes des tapas, mais aussi des marchés asiatiques, où l’on mange à toute heure du jour et de la nuit.

Reconversion d’anciens marchés

Cela s’est parfois fait au sein même d’un ancien marché couvert. Comme c’est par exemple le cas à Madrid au Mercado San Miguel, à Séville au Mercado de Triana (photo) ou aux impressionnantes Halles Paul Bocuse de Lyon.

Vacances en Andalousie

Tandis qu’à Berlin, le vieux marché de la Markthalle Neun (photo), dans le Kreutzberg, a rouvert ses portes en fanfare en octobre 2011. Depuis le succès ne se dément pas, notamment le jeudi soir pour le Street Food Thursday et, le week-end, pour le brunch. Sur le même modèle, la capitale allemande se régale également à l’Arminius Markthalle ou à la Marheineke Markthalle.

Dans les pays où la tradition gastronomique était moins implantée, il a parfois fallu repartir à zéro. C’est le cas à Rotterdam par exemple au très dynamique Markthal, impressionnant structure contemporaine impressionnante inaugurée en 2014, mêlant commerces de bouche et petite restauration.

Toujours en pointe des tendances, Londres connaît évidemment depuis longtemps le même mouvement. Ainsi, le vénérable Borough Market (photo) a été revitalisé pour devenir incontournable dans la capitale britannique. Tandis que le plus ethnique Brixton Village a donné un coup de fouet à ce quartier jamaïcain défavorisé du sud de Londres. Et de nouveau food courts voient sans cesse le jour. Que ce soit le très chic Arcade Food Theater à Soho ou l’explosif Market Hall Victoria près des jardins de Buckingham Palace, où les jeunes yuppies du quartier vienne manger un Roti Canai au curry de mouton malais au Gopal’s Corner, en buvant une bière artisanale.

Chelsea Market: le modèle

Beaucoup de ces néo-marchés gourmets se sont inspirés de l’impressionnant Chelsea Market new-yorkais, qui s’est développé dès la fin des années 1990 dans une ancienne biscuiterie de la fin du XIXe siècle occupant un bloc entier du Meatpacking District, entre la 9e et la 10e Avenue. Appartenant aujourd’hui à Google (via sa maison mère Alphabet), cet immense complexe de dizaines de restos, snack, magasins et de bureaux a bénéficié de l’ouverture de restaurants emblématiques (comme le Japonais Morimoto), mais aussi des émissions de la chaîne Food Network, basée sur place.

Le Chelsea Market a également été intégré au développement, dès 2009, de la High Line. Installée sur une ancienne ligne de chemin de fer vouée à la destruction, qui amenait autrefois la nourriture des quatre coins des États-Unis au cœur même de New York, la désormais emblématique promenade suspendue traverse le deuxième étage du Chelsea Market et offre parmi les plus belles perspectives sur Manhattan. Laquelle est d’ailleurs rythmée par des bars, des échoppes, tandis qu’elle a développé son propre food court à ses pieds.

Tandis que Williamsburg, quartier en plein essor de Brooklyn, s’enorgueillit de son génial Smorgasburg, en écho à la tradition danoise, et qui est aujourd’hui le plus grand marché gourmand ouvert des États-Unis, attirant chaque week-end 20 à 30000 New-Yorkais.

Reste que la formule n’est pas toujours gagnante. Ainsi, inauguré fin 2016, le très chic Mercado anversois (photo), conçu sur le modèle des marchés espagnols, a fermé ses portes un an plus tard. Tout comme le Holy Food Market à Gand, qui était installé depuis mars 2016 dans la chapelle Baudelo, une église du XVIe siècle.