Durant tout l’été, le chef bruxellois Christophe Hardiquest quitte son “Bon Bon” doublement étoilé (en travaux) pour régaler les papilles dans son “Bistrot de l’été”, à deux pas de Flagey. Ouvert depuis mardi, l’endroit, qui fermera ses portes le 2 septembre, fait déjà salle comble!
Un chef en salle
C’est une image qu’on ne verrait pas chez “Bon Bon” ! En plein milieu de la salle de “Mon bistrot d’été”, Christophe Hardiquest s’attelle sur sa belle Berkel rouge à découper lui-même la saucisse de canard de chez Patrick Duler et l’entrecôte maturée de chez Hendrik Dierendonck servies aux premiers clients de son bistrot éphémère, qui a ouvert mardi dernier et est déjà quasiment sold out.
Quelques jours après l’ouverture des réservations, toutes les tables du soir étaient en effet réservées ! Il reste heureusement quelques places à midi quasiment tout le mois d’août, tandis qu’on peut venir tenter sa chance à l’improviste à partir de 20 h 30. Et prendre un excellent Kir bruxellois (mélange de Cuvée Ruffus brut sauvage et de kriek Cantillon; 12€) sur les mange-debout installés sur le trottoir et grignoter d’excellentes rillettes de sardine au whisky (14 €) en attendant qu’une table se libère…
Un bistrot durant les travaux
Si le chef deux étoiles bruxellois a choisi d’ouvrir cette table à deux pas de Flagey, c’est parce que, depuis samedi dernier, il fait d’importants travaux dans son restaurant deux étoiles de l’avenue de Tervueren. “Cela va durer tout l’été. Financièrement, je ne peux pas me permettre de rester fermé deux mois, nous confiait le chef, quelques jours avant d’inaugurer son pop-up. Et puis, deux mois, c’est long. Il faut que je reste en mouvement. Je veux être créatif, faire bouger Bruxelles, avoir des projets ponctuels pour m’amuser.”
Dès le 5 septembre, c’est en effet un tout nouveau “Bon Bon” qui accueillera les clients. “Après 15 ans, c’est la première fois que je m’offre une cuisine neuve, avec un fourneau et une hotte sur mesures. Quand je me suis installé ici il y a six ans et demi, j’ai gardé le fourneau, qui aura fait 48 ans de bons et loyaux services !”, explique Hardiquest. Qui a fait pas moins de 450000€ d’investissements pour rénover sa cuisine (qui accueillera également un barbecue pour la cuisson à la braise) mais aussi pour agrandir ses chambres froides et renouveler sa terrasse, avec de belles tables en pierre bleue du pays… Bref pour s’offrir un resto taillé sur mesures pour enfin décrocher la troisième étoile Michelin que tout le monde lui promet.
Retour aux sources
Après avoir déjà bien potassé sa nouvelle carte pour la rentrée – où il prolongera sa formidable relecture de la cuisine bruxelloise, en retravaillant par exemple la langue de veau sauce Madère en version savarin ou l’oiseau sans tête, avec une caille désossée farcie au hachis de lard et shiitakes bruxellois –, le chef s’offre donc deux mois de vacances de la haute gastronomie.
C’est aussi pour trancher avec son restaurant doublement étoilé qu’il a choisi de s’inviter temporairement dans l’ancien “Marie” (propriété du producteur de cinéma Dominique Janne), dont il n’a rien touché au magnifique décor de bistrot bruxellois à l’ancienne. “J’ai visité d’autres endroits fantastiques mais je ne voulais pas continuer à faire du “Bon Bon”. J’ai vu là l’opportunité de reprendre un endroit de caractère, de revenir aux sources, avec ces banquettes, ces miroirs… Ça me rappelle la rue des Carmélites (à Uccle, où était installé Hardiquest avant de déménager à Woluwe-Saint-Pierre, NdlR). L’esprit, ça compte : l’ambiance bistrot, le bois, le brouhaha… Cela n’a rien à voir avec “Bon Bon” !”
Gourmandise à la belge
Composée avec une grande minutie depuis deux mois, la carte du “Bistrot d’été” est 100 % raccord avec l’ambiance qui y règne (tandis que, côté vins, le nature est évidemment de la partie, à des prix accessibles, avec des bouteilles dès 30 €). Hardiquest joue ici à fond la carte de la gourmandise et des produits belges (qui représentent 80 % de la carte). Comme avec cette excellente tagliata de cheval au vieux gouda Reypenaer, roquette et vinaigrette à la kriek (36 €).
A accompagner de vraies bonnes frites à la belge (6 €), sur lesquelles Hardiquest et ses équipes ont bossé trois semaines pour trouver la cuisson idéale : un premier bain dans l’huile végétale, avant une seconde cuisson à la graisse de bœuf. On peut choisir également son assaisonnement (ail, piment…).
Tandis que les palourdes sont ici ouvertes à la blanche de la brasserie Dupont à Leuze-en-Hainaut (18 €), avec juste un peu de citron et des herbes fraîches.
En entrée, on trouve également un formidable petit gratin de moules à la bruxelloise (18 €), qui donne une irrémédiable envie de saucer ! “On a dans ce pays les meilleures moules !, commente le chef. Je fais aussi une aile de raie dans une version estivale, avec une fondue de tomates, des câpres, de l’aubergine et une pomme de terre nature au persil. Ou un stoemp d’été au lard confit, fleurs de capucine, radis crus, patates et haricots verts, un peu façon salade liégeoise et à manger avec les doigts. J’ai voulu une carte vivante, marrante. Je veux qu’on soit dans la gourmandise, pas le luxe. Mais avec des produits sélectionnés.”
Une place pour la créativité
Christophe Hardiquest n’oublie pas pour autant qui il est. Sur certaines assiettes, on retrouve toute sa créativité. Comme dans cette superbe cargolade de petits-gris de Namur aux pommes de terre (22 €), où la réglisse apporte originalité et profondeur. Voilà une entrée qui met superbement en valeur un produit local !
En dessert, si l’on ne succombe pas au charme d’un sabayon au champagne monté en salle tout simplement parfait (16 €) ou à un petit cône de glace cuberdon-framboise-hibiscus ou au foin (5 €), on pourra également déguster une très rafraîchissante salade de tomates, pastèque et concombre, avec du basilic frais et un petit granité de tomate-tonic (12 €).
Cette créativité sera aussi de la partie dans des petites suggestions “en stoemelings” pour les initiés, où le chef proposera par exemple une tête de veau “Retour de Corée” (au sésame et soja) ou encore une vraie bolo aux foies de volailles.
L’envie de transmettre
Mardi soir, à l’heure de quitter “Mon bistrot d’été”, les premiers clients n’avaient qu’une question aux lèvres : cela va-t-il vraiment s’arrêter en septembre, quand toute l’équipe rejoindra les nouvelles cuisines de “Bon Bon” ? Ce qui est certain, c’est qu’Hardiquest ne sera plus là. Par contre, il n’exclut pas de transmettre l’endroit à quelqu’un d’autre… Pourquoi pas à un jeune passé par ses cuisines ? Un peu comme il avait aidé son ancienne seconde Laure Genonceaux à ouvrir son “Brinz’L” dans l’ancien “Bon Bon” de la rue des Carmélites… “J’imagine bien, chaque été, lancer un projet, réactiver un lieu, sans en être le chef…”, se prend déjà à rêver Christophe Hardiquest. On rêve avec lui…
Envie d’y goûter?
=> ”Mon bistrot d’été”.
40 rue Alphone de Witte, 1050 Ixelles.
Jusqu’au samedi 2 septembre 2017 (sans réservation à partir de 20 h 30). Fermé dimanche et lundi.
Réserv. : www.resengo.com/fr/monbistrodete.