S’il refuse le mot, trop connoté, c’est bel et bien une vraie gastronomie “végétarienne” que Nicolas Decloedt, 38 ans et végétarien depuis 19 ans, à sa table d’hôtes “Humus Botanical Gastronomy”, où il peaufine sa cuisine avant l’ouverture en septembre d’un “pop up” restaurant à Bruxelles et plus si affinités.  Dans le restaurant “Eat Love” où il travaille à Gand, le jeune chef flamand travaille le poisson et la viande, mais chez lui, c’est 100 % légumes !

Et si le résultat est si épatant, c’est que le chef a été formé non dans la sphère végé mais chez les meilleurs  : école hôtelière de Coxyde, “In de wulf”, “Mugaritz”, “Le chalet de la forêt” et trois ans chez “Bon Bon”. Tandis qu’en jetant un œil à sa bibliothèque, on découvre de belles sources d’inspiration. S’y accumulent en effet les ouvrages de Dan Barber, Ferran Adrià, René Redzepi, Magnus Nilsson, François Couplan, Heston Blumenthal, Michel Bras, Kobe Desramaults, Thomas Keller…

Photographie Johanna De Tessières

“Je préfère dire que je cuisine les légumes sans viande et sans poisson; je ne veux pas être rapproché des restos végétariens, pas assez gourmands. Il y a deux façons de cuisiner et de manger. Si l’on parle de manger pour vivre, ils font du bon boulot car ils utilisent de bons produits bio, durables, locaux. Ça a du goût mais ce n’est pas de la gastronomie. Ça reste toujours un peu la même chose  : un hamburger végé, la graine au milieu et quatre-cinq préparations de légumes autour. Ça va pour un petit lunch au boulot mais ce n’est pas là que j’irais pour passer une bonne soirée et m’amuser. Pour moi, manger, c’est plus que ça. J’aime montrer aux gens que l’on peut cuisiner sans viande et sans poisson. Je n’utilise pas le mot végétarien pour éviter que les gens aient l’impression qu’il manque quelque chose dans l’assiette”, explique Nicolas Decloedt, qui donne également des cours de gastronomie végétarienne dans le cadre de Horeca Formation à Bruxelles.

La formule est simple : Nicolas Decloedt annonce sur sa page Facebook les prochaines dates de sa table d’hôtes “Humus Botanical” (on peut s’inscrire pour les 14, 15 et 16 mai prochains par exemple). Les gens s’inscrivent et, le jour dit, s’installent autour d’une grande table dressée dans sa maison de Jette. Le festin végétal (40€ par pers. avec une belle sélection de vins nature) peut commencer.

« Humus Botanical Gastronomy »: une table d’hôtes en forme d’ode aux légumes

Nicolas Decloedt en action chez lui où il organise deux à trois fois par mois des tables d’hôte.

Un apéritif tout en légèreté

L’apéritif est un régal de légèreté, entre une eau de kéfir et des petits grignotages bien pensés : crackers de seigle et crème de céleri-rave rôti à la poudre de café, pickles de chou blanc, radis noir et vinaigrette au petit-lait de brebis et cerfeuil sauvage, castagnaccio toscan à base farine de châtaigne avec un bon fromage frais…

Ou encore une superbe déclinaison de choux avec des jets de brocoli pourpre et de chou-fleur sauvage, repoussés sur les plans de l’année dernière, à tremper dans une petite mayonnaise au colza.

On est d’emblée impressionné par la facilité avec laquelle Nicolas Decloedt parvient à magnifier des produits aussi simples… Si c’est si bon, c’est aussi que les légumes sont exceptionnels, provenant du Monde des Mille couleurs à Dekkebus, qui fournit de grands restaurants flamands comme “In de wulf” ou “Benoit & Bernard Dewitte”…

Magnifier des légumes d’exception

Le repas se poursuit tout en subtilité avec un mini-chou-navet simplement posé sur une salade de quinoa belge, assaisonnée au yaourt, au fromage blanc, à l’huile d’olive et aux feuilles des choux. Avec pour relever, un peu d’ail des ours cueilli en forêt de Jette. On reste véritablement bouche bée devant l’explosion de saveurs de ce plat pensé autour de si peu d’ingrédients.

Même ce petit chicon cru pleine terre et sa compote de pommes mirabelles (une variété ancienne) emportent l’adhésion des hôtes.

Tout comme le sobre pak choï, poireau du jardin de la grand-mère du chef et crème de poireau au miso blanc, juste soulignés par la délicatesse d’un superbe condiment alliant échalote confite, citron au sel, cornichons maison et épinards.

Jamais de frustration

Jamais durant le repas, on ne ressent la moindre frustration de ne pas avoir de viande ou de poisson. Sans doute parce que jamais Decloedt ne leur cherche de substituts (tofu, seitan…). Même au moment de la “grosse pièce”, un magnifique chou rouge cuit à basse température proposé avec une crème de Chèvre-Feuille (un chèvre frais bio produit à Haillot), de l’échalote confite et du gruau de sarrasin.

Si le premier dessert autour du céleri (confit et en meringue), proposé avec une crème de yaourt de brebis de Lisbelle et un sorbet au kéfir, manque de gourmandise.

Le chef se rattrape avec une excellente tartelette croquante au chocolat Pierre Marcolini.

Un chef à découvrir absolument

Et l’on ne doute pas une seconde que sera rapidement reconnu le talent de chef qui travaille le meilleur de la terre avec une technique moderniste éprouvée mais aussi un vrai sens du raffinement. Vivement qu’il ouvre son propre restaurant de légumes à Bruxelles !

Cette critique a été publiée dans « La Libre Belgique » du 9 mai 2015.

Envie d’y goûter? 

• Cote: 7,5/10.
• Cuisine: végétale.
• Cave: vins nature.
• Cadre: comme à la maison.
• Terrasse: non.
• Parking: non.
• Adresse: 20 avenue Giele 1090 Bruxelles.
• Rens.: 0474.65.37.06 ou Facebook.
  
• Quand: prochaines dates le week-end de l’Ascension, les 14, 15 et 16 mai 2015.