« Savage »: presque végé…

Ouvert depuis quelques mois place Saint-Boniface à Ixelles, Savage est un petit bistrot bien dans son temps qui fait parler de lui. Les marqueurs du succès sont respectés: déco chiadée façon « diner » tendance — notamment ce grand tableau qui énumère les propositions du jour façon Scrabble — et une attention aux tendances actuelles.

Concept bancal

Confiée au jeune flamand Joel Rammelsberg, en provenance du San de Gand (qui vient seulement de rouvrir ses portes après des mois de fermeture), la cuisine joue la carte du flexitarisme et met en avant des artisans locaux (notamment les brasseries bruxelloises, les vins de chez Titulus, les légumes du Monde des 1000 couleurs…). Le 13 septembre prochain, l’adresse proposera d’ailleurs un dîner dans le cadre de l’événement « Soilmates » (85€/pers. pour 6 services), qui pousse les mangeurs à réfléchir à ce qu’ils mettent dans leur assiette.

Le soir, Savage propose un menu unique (36€) composé de quatre petites dégustations végétariennes. À agrémenter d’une série de propositions protéinées pour celles et ceux qui ne peuvent pas s’en passer… ou pour ceux qui ont faim. Mais, disons-le d’emblée, le concept développé au « Savage » ne fonctionne pas.

Dans les pas de San

Le menu en soi tient la route, avec ses petites assiettes soignées. Il y a quelques semaines, le chef associait par exemple betterave et fraises dans un joli petit bol de saison plein de peps. On sent que le jeune chef a été formé à l’école San Degeimbre.

Son stoemp de pomme de terre et chou-rave au foin est ainsi proposé avec un excellent jus lactofermenté à l’ail des ours monté au beurre. Rien à redire, c’est bon!

OK, le dessert, une soi-disant panna cotta au thé blanc présentée avec un granité au sureau, est pas top, mais dans l’ensemble, c’est franchement sympa.

Des protéines en sus

Le problème, c’est que, ne comportant ni protéines, ni céréales, le menu ne nourrit pas son homme, et sans doute pas plus son Instagrammeuse végé. Il faut donc jouer le jeu des petites assiettes complémentaires. Et là, ça ne fonctionne plus du tout. Non seulement, ce soir-là, rien de ce qu’on a goûté n’était convaincant — rendang indonésien beaucoup trop acide (10€), secreto iberico grillé trop gras et trop sucré (9€)…

Surtout, ce ne sont pas des plats: juste de la viande ou du poisson purs, sans aucun accompagnement et qui jurent avec le raffinement du menu.

Pour un peu de cohérence, il aurait fallu, soit ne proposer que des petites assiettes à partager, végé ou non. Soit imaginer, pour chaque plat du menu, une alternative non végétarienne, pour rester dans l’esprit resto. En attendant, c’est bancal.

Cet article est paru dans le « Trends-Tendances » du 2 septembre 2021