Faire pousser ses propres endives à la cave, c’est possible ! En plus, c’est facile et pas cher… La preuve avec cet atelier organisé par l’association « Chicon en ville »…

Un atelier 100% chicon

Arnout Vandamme se souvient qu’enfant, lorsqu’il rendait visite à son grand-père dans les Marolles, il y avait toujours des bacs à chicons… Longtemps en effet les Bruxellois ont cultivé ce légume dans leur cave. C’est ce souvenir qui a poussé ce jeune Courtraisien à créer le projet “Witloof in de stad/Chicon en ville” il y a deux ans à Bruxelles.

Avec le développement de l’agriculture urbaine et grâce au soutien de Bruxelles Environnement – dans le cadre du projet Good Food initié par la Région Bruxelles-Capitale pour une alimentation plus durable –, Arnout a eu l’idée d’organiser des ateliers pour apprendre à tout un chacun à planter des chicons chez soi. Et c’est simple comme bonjour !

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Une méthode facile, un résultat gratifiant

Rendez-vous était donc donné à une quinzaine de participants le 16 décembre dernier chez “Refresh” – chouette cantine conscientisée d’Ixelles – pour apprendre à faire pousser des chicons à la maison. Pour ce faire, il faudra juste se procurer des racines de chicorée et respecter quelques principes de base.

Si, lors de cet atelier, un kit de démarrage est proposé, en général, on achètera les racines de chicorée chez un fermier, qui aura planté ses semences en avril et récolté en août de belles carottes. Pour préparer les racines à produire des chicons, le fermier en aura ôté les feuilles vertes qui auront poussé entre-temps, et les aura découpées à 17 cm de longueur. Ensuite, il aura mis ces carottes au repos, en vernalisation, pendant quelques mois. Puis viendra l’étape du forçage, soit la deuxième poussée dans des conditions contrôlées.

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C’est à partir de là qu’on utilise les racines de cichorium intybus à la maison. Il suffira de prendre une bouteille d’eau (voir photo) et d’y faire quelques trous à la base ou d’opter pour un plus grand bac, mais il est impératif que l’irrigation se fasse par le bas. Les racines de chicorée doivent être plantées en rangs serrés dans un terreau sans engrais. Car contrairement à d’autres légumes, le chicon n’aime pas les sols riches. Il est également important qu’il y ait en permanence quelques centimètres d’eau pour irriguer les racines. Il faudra ensuite maintenir le tout à une température entre 12 à 18°C et à l’abri de la lumière pour empêcher la photosynthèse. Trois à quatre semaines plus tard, les chicons seront déjà prêts à être récoltés. Mais attention, un chicon ça se casse, ça ne se coupe pas !

En plus d’initier les Bruxellois à la culture du chicon, Arnout consacre aussi des ateliers à sa cuisine où dans un esprit zéro déchet, il va même jusqu’à cuisiner la racine de chicorée…

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Une simple bouteille d’eau en plastique peut être recyclée pour y faire pousser trois beaux chicons ! Il suffit de la couper au 3/4 de sa hauteur, de percer des trous dans le fond et d’y mettre du terreau (sans engrais) et les racines de chicorée !

La folie chicon

Le Belge est le plus gros consommateur de chicon au monde, il en consomme 8 kg par personne et par an. Pas étonnant donc qu’il y ait chez nous un véritable engouement pour ce produit typiquement belge (cf. ci-dessous). De nombreuses autres initiatives sont en effet organisées autour du chicon à Bruxelles. Le 3 mars, la commune de Schaerbeek organisera, en partenariat avec Arnout Vandamme, toujours lui, un “Salon Chicon”. Où quelques cuisiniers amateurs organiseront, avec l’aide financière et logistique de la commune, des tables d’hôtes autour d’un menu trois services qui aura pour but de mettre en valeur le légume.

Chicon peut aussi rimer avec champignon. Ainsi PermaFungi – coopérative à finalité sociale installée depuis 2014 dans les caves de Tour et Taxis qui s’est fait un nom en produisant des pleurotes à partir de marc de café recyclé – cultive aussi, depuis novembre 2016, des chicons bio dans le même substrat qui a servi à faire pousser les champignons. On les déniche dans la chaîne de supermarchés durables “Färm” à Bruxelles.

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En octobre 2017, un autre projet a également vu le jour : “Mr Fungi & Mme Witloof”, initié conjointement par les communes de Saint-Gilles et de Forest, toujours dans le cadre de la stratégie GoodFood. Une partie du site de l’Imprimerie de Forest, où est installé un potager pédagogique, a été dédié à la production urbaine de chicons et des ateliers gratuits à destination du grand public y sont organisés. Lors de ces formations, on apprendra à planter des chicons après avoir fait pousser des champignons, sur base des résidus…

De quoi démontrer qu’il est possible de cultiver de manière durable un produit local chez soi, dans un esprit d’économie circulaire !

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Envie d’essayer ?

Toutes les infos sur les ateliers culture (5€) et cuisine (25€) du chicon organisés par Arnout Vandamme chez “Refresh”, “Bees Coop”, “Recyclart”… sur Facebook.com/witloofchicon. Avec, bientôt, la possibilité de commander en ligne les racines de chicorée chez “Bees Coop” auprès de Koen Van Haesendonck à Zemst, une ferme familiale spécialisée dans la culture de chicons de pleine terre depuis des décennies (10 ou 20 racines pour 3,50€ ou 7€).

 

Un produit belge, une fois!

La légende raconte que le chicon serait né par hasard, un jour de 1830 en Belgique… Un paysan schaerbeekois qui avait caché sa récolte de racines de chicorée dans sa cave pour éviter de se la faire voler, découvrait quelques semaines plus tard de délicieuses feuilles blanches (witloof) au bout des racines…

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© Witloofmuseum Kampenhout/Centre d’histoire agraire (CAG)

L’histoire officielle, elle, retient François Bresiers, jardinier des serres royales du Jardin botanique, lequel aurait joué un rôle important dans le développement de sa culture en pleine terre. Si vers 1870, celle-ci se limitait aux communes de Schaerbeek et d’Evere, son ère géographique s’est ensuite étendue à Bruxelles puis Malines et Louvain. Mais la ville dont l’histoire reste intimement liée à celle du chicon, c’est Haren, au nord de Bruxelles, d’où partaient, par trains spéciaux depuis la Witloof Station, les chicons à destination de toute l’Europe mais aussi des Etats-Unis, de l’Asie et du Moyen-Orient.

Jusqu’à la Première Guerre mondiale, les racines étaient surtout cultivées pour produire de la chicorée, moins chère que le café. Ce n’est qu’ensuite que le chicon devient un légume consommé par toute la classe moyenne et dont le succès va grandissant aux Etats-Unis. La Belgique connaît alors un boom du chicon, entre les années 50 et 70, jusqu’à l’apparition de l’hydroculture développée en France et en Hollande, qui fera fortement de l’ombre aux producteurs belges…

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Amusant souvenir d’une élection de Miss Witloof en 1970. A partir des années 50, des bals étaient organisés dans les villes où on cultivait le chicon, à Haren, Kortenberg ou encore Kampenhout, où se trouve aujourd’hui le musée du chicon. © Witloofmuseum Kampenhout/Centre d’histoire agraire (CAG)

Deux labels de qualité

Si le prix du chicon pleine terre est beaucoup plus cher que celui hydroponique, c’est parce qu’on ne le trouve qu’en hiver et que sa culture demande plus de savoir-faire et d’attention. Ce produit de notre terroir, au léger goût amer, bénéficie de deux labels de qualité différents.

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Collectie familie P. Cnops

Depuis août 2008, le chicon bruxellois de pleine terre, le “Brussels Grondwitloof”, est reconnu par l’Union européenne par une Indication géographique protégée (IGP), qui délimite un territoire qui va bien au-delà de Bruxelles puisque l’aire de production autorisée s’étend jusqu’en Flandre orientale.

On trouve aussi des chicons pleine terre “Brabants Grondwitloof” ou “Grondwitloof uit de Denderstreek”, qui ne bénéficient pas de l’IGP, mais qui sont reconnus par le label flamand Streekproduct Regio&Traditie. Lequel indique non seulement le numéro de lot mais aussi le nom du producteur.

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© Witloofmuseum Kampenhout/Centre d’histoire agraire (CAG)