« Allez viens, on va manger chez Bernard. » Lorsqu’on pousse pour la première fois la porte du « Coq au vin », petit restaurant ouvert depuis 1996 dans le bas de la chaussée d’Alsemberg à Uccle et qui vient de déménager à deux pas, rue de la Fauvette, c’est comme si l’on poussait la porte d’un lieu familier. Comme si l’on rendait visite à quelqu’un qu’on connaissait depuis toujours.
Voyage en Bresse
C’est peut-être parce que la décoration kitsch et monomaniaque autour de centaines de coqs et de poules confère une atmosphère particulière aux lieux. C’est surtout parce que Bernard Paquet est seul en cuisine et en salle. Et qu’il prend longutement le temps d’expliquer chaque détail de la carte et sa philosophie.
Originaire de Pont-de-Vaux, une petite commune de la Bresse, le chef est fier de son terroir et propose une cuisine française bourgeoise préparée dans les règles de l’art, sans fioritures. A chaque saison, Bernard prend plaisir à retrouver les spécialités qu’il affectionne: poulet de Bresse (évidemment), pieds et paquets à la provençale, choucroute garnie… Et même, l’été, des spécialités antillaises! Car le bougre a pas mal bourlingué. Il a travaillé un an et demi comme commis sur le France et a notamment vécu en Guadeloupe.
Ce soir-là, sur le tableau en forme de coq, on choisit à la lueur des bougies le menu 3 services à 50€ (60€ avec les vins). Le repas débute par une mise en bouche réconfortante, une soupe paysanne avec un excellent bouillon de poule maison et un petit cerdon rosé pétillant (6€).
Les oeufs meurettes, chef-d’oeuvre oublié
Suivent les oeufs en meurette (15€), un classique de la cuisine bourguignonne qui a presque disparu des radars. Sur du pain grillé et aillé, trônent deux oeufs pochés accompagnés d’une sauce au vin rouge, de lardons et de champignons. Le bonheur! Un plat comme on n’en fait plus et qui vaut à lui seul la visite au « Coq au vin ».
Les oeufs pochés aux jets de houblon sauce mousseline (27€) sont eux aussi divins.
Le feuilleté de queues d’écrevisses sauce Nantua (18€) – sauce à base de béchamel et de beurre d’écrevisses – est dans la même lignée.
Des plats classiques
On pourrait s’arrêter là, tant ces entrées sont copieuses mais, la curiosité piquée, on enchaîne avec la spécialité de la maison, le coq au vin (24€), dont la sauce est bien concentrée et servi avec des pommes de terre vapeur.
Et un hachis parmentier, réalisé, comme il se doit, avec de la viande de pot-au feu (21€). C’est du lourd, c’est riche mais une bonne salade rafraichit l’ensemble.
Tandis que, plus traditionnelle, l’entrecôte irlandaise s’offre une sauce au poivre blanc concassé là encore préparée dans les règles de l’art et des frites maison (24€). Dommage que la viande, bien cuite, ne soit pas un poil meilleure…
La carte des vins est, elle aussi, réjouissante puisqu’elle met en avant des vins régionaux à un excellent rapport qualité-prix. Tant le corbières Château Vialade 2009 à 20€ que le costières-de-nîmes « Grande Exception » 2010 à 21€ font leur office!
L’histoire d’un homme
Quand un restaurant parvient à raconter une histoire, à faire vivre ses assiettes, on a déjà envie de l’aimer. Bernard réussit ce pari jusqu’aux desserts, où l’on se régale avec joie de la crème caramel de son enfance, la mousse au chocolat de mamie Marthe ou la faisselle de fromage blanc à la crème et au sucre comme en Bresse.
Les foodies modeux passeront leur chemin. Mais ceux qui, comme les habitués de Bernard, seront touchés par cette cuisine d’autrefois en sursis voudront à tout prix faire vivre ce délicieux petit restaurant de quartier.
Cette critique a été publiée dans le « Trends-Tendances » du 9 avril 2015.
Envie d’y goûter?
- Cote: 7/10.
- Cuisine: bourgeoise.
- Cave: française.
- Cadre: kitsch.
- Terrasse: non.
- Parking: non.
- Adresse: 17 rue de la Fauvette 1180 Uccle.
- Rens.: 02.376.43.13 ou www.lecoqauvin.be.
- Ouverture: fermé samedi midi, dimanche et lundi.
La fille: « J’y retournerais bien pour le poulet de Bresse, le cassoulet, la choucroute… A toute saison, on a envie de retrouver les bons petits plats réconfortants de Bernard.«
Le garçon: « Quel plaisir de découvrir qu’il existe encore des petites adresses comme celles là, où l’on déguste une cuisine d’un autre temps, absolument en dehors de toutes les tendances, mais qui, quand elle est bien faite comme ici est toujours aussi succulente… »
Et la ligne dans tout ça!
Mais cela rappelle tant de bonnes choses. Le grand père du garçon cuisinait un coq au vin délicieux et tant pis si cela lui prenait toute la journée…