Il a fallu attendre un Français, Michel Thoulouze, pour voir renaître un vignoble digne de ce nom à Venise ! C’est en 2003 que celui-ci, connu pour ses succès télévisuels, – il a notamment été le producteur de « 7 sur 7 » ou des Nuls sur Canal+, – décide de racheter quelques hectares sur l’île de Saint-Erasme pour y planter des vignes.

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La tradition vinicole vénitienne avait en effet quasiment disparu. Car si du temps des doges on produisait du vin dans les nombreuses îles de la lagune et jusque sur la place Saint-Marc, il ne restait plus, jusqu’il y a peu, que quelques paysans qui cultivaient leur vigne ci et là. Michel Thoulouze a été le premier à faire revivre cette culture dans la lagune et il est aujourd’hui suivi par d’autres, dont la famille Bissol, viticulteurs en valdobbiadene qui font renaître, à Mazzorbo (au sein du fabuleux restaurant-hôtel « Venissa »), la dorona, un cépage cultivé jusqu’au XIVe siècle et dont il n’existait plus guère que quelques exemplaires dans les campagnes insulaires. Et toujours à Saint-Erasme, il y aurait un producteur de prosecco qui viendrait, cette année, d’y planter des vignes… Preuve que le renouveau du vin à Venise est en marche… Le filon marketing devant sans doute y être pour quelque chose!

 

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Des vignes photographiées au hasard sur l’île de Saint-Erasme.


Passionné par le vin, Michel Thoulouze a fait appel à des spécialistes pour l’aider dans son entreprise: Jacques Seysses, viticulteur renommé du Domaine Dujac à Morey-Saint-Denis, Lydia et Claude Bourguignon, deux ingénieurs agronomes experts des sols, et Alain Graillot, du domaine éponyme en Crozes-Hermitage. Ils l’ont aidé à sélectionner les cépages, tout d’abord la
 malvasia istriana locale (60%), à laquelle on a ajouté du vermentino (30%) et du fiano d’Avellino (10%) pour constituer un assemblage harmonieux.

Ces spécialistes l’ont également aidé à préparer le terrain pour la vigne. Il a ainsi fallu remettre en service l’antique système de drainage de l’île, des canaux qui traversent la propriété pour recueillir les eaux de pluie, évacuées ensuite en ouvrant des écluses à marée basse. Tandis que l’on a planté de l’orge ou du radis chinois pour que la terre très salée travaille et s’assouplisse.

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Des vignes photographiées au hasard sur l’île de Saint-Erasme.

Les vignes ont ensuite été plantées, franches de pied, car l’écosystème de la lagune protège du phylloxera; l’insecte destructeur n’aime en effet pas l’eau… Tandis que la culture se fait sans produits chimiques. Le vin passe 7 à 8 mois en cuve inox – Thoulouse refuse le goût boisé -, et une année en bouteille avant sa commercialisation. La première cuvée date de 2005 (500 bouteilles). En 2006, on comptait déjà 10000 bouteilles et on est autour des 18000 flacons aujourd’hui. Même si cette année les vendanges ont été désastreuses à cause de la sécheresse et des chutes de grêles qui ont réduit la production à 40% avec seulement 50 hectolitres…

Pas reconnu par une DOC, « Orto » (qui signifie « jardin » en italien, en référence à la vocation première de l’île de Saint-Erasme) n’a pas besoin de cela pour connaître un succès fulgurant. Il est en effet commercialisé jusqu’au Canada depuis peu. Et a déjà séduits de grands chefs français comme Anne-Sophie Pic ou Alain Ducasse. C’est un vin frais, minéral, a l’acidité très équilibrée. Dommage qu’il soit si cher… 25€ à la propriété et environ 30€ ailleurs. Le prix de la rareté…

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La propriété de Michel Thoulouze et ses vignes.